jeudi 24 octobre 2024

René Gabriel, un designer avant la lettre

 SOURCE: https://explore.psl.eu/fr/le-magazine/focus/rene-gabriel-un-designer-avant-la-lettre

Une vie = une œuvre

Aucune image de l’homme ou de ses proches, pas de documents administratifs, de correspondance : les quelque 3 500 archives de René Gabriel, accessibles via la bibliothèque numérique de PSL, sont exclusivement des travaux préparatoires et des photographies de ses productions. La vie de cet artiste au parcours éclatant reste dans l’ombre.

René Gabriel, Publicité. Dessin à la mine de plomb et à la gouache
Publicité. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, 1940 (© René Gabriel. Droits réservés)

René Gabriel naît en 1890 à Maisons-Alfort, dans un milieu modeste. Il entre à l’École Germain Pilon en 1912 puis à l’École supérieure des Arts Décoratifs (aujourd’hui l’EnsAD, établissement associé de l’Université PSL), dont il sort diplômé en 1917. Désargenté, il gagne sa vie en montant des décors de spectacles et se lie alors d’amitié avec l’homme de théâtre Léon Chancerel.

Sigismond Chrome, dominotier

En 1919, René Gabriel s’établit dominotier, c’est-à-dire fabricant artisanal de papier peint, ouvrant une boutique rue de Solferino. Il refuse la mécanisation et travaille « à la planche ».

La publicité pour ses produits passe par un personnage imaginaire, « Sigismond Chrome », vieux dominotier inventé par Léon Chancerel et s’exprimant par sa plume. René Gabriel lui dessine un visage et met en page ses slogans, démarrant à cette occasion une activité durable de graphiste et d’illustrateur.

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Sigismond Chrome. Impression d’un dessin de René Gabriel, 1929 (© René Gabriel. Droits réservés)
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Table d’impression d’un dominotier. Dessin à l’encre, 1931 (© René Gabriel. Droits réservés)
Projet de céramique pour la Manufacture de Sèvres. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, 1927 (© René Gabriel. Droits réservés)
Projet de céramique pour la Manufacture de Sèvres. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, 1927 (© René Gabriel. Droits réservés)

Un créateur polyvalent

En 1919, René Gabriel crée également des meubles, qu’il présente au Salon d’Automne et au Salon des Artistes Décorateurs, le SAD ; il acquiert très vite succès et notoriété. À partir de 1924, il enseigne le dessin à l’École des Arts appliqués de la Ville de Paris.

Son travail se diversifie encore au cours des années vingt puisqu’il dessine des céramiques et réalise des décors de théâtre.

De l’Art Déco à l’épure

Les premières créations de René Gabriel s’inscrivent dans le style « Art déco », qui donne une place importante à l’ornementation. Cependant, l’artiste s’oriente rapidement vers des formes simples et des matériaux peu coûteux.

Son importante participation à l’Exposition internationale des Arts Décoratifs en 1925 témoigne d’un style moderne tranchant sur les décors surchargés qui dominent.

Cuisine. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, 1925
Cuisine. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, 1925 (© René Gabriel. Droits réservés)

La technique à visage humain

En 1929, René Gabriel revend sa boutique pour rejoindre l’entreprise Viacroze, qui édite et diffuse son mobilier et ses papiers peints.

Ceux-ci sont désormais produits mécaniquement : l’artiste prend le tournant de l’industrialisation mais il saura, tout au long de sa carrière, donner à la production industrielle un visage humain.

Son travail s’incarne d'ailleurs à nouveau dans un personnage : « l’Oncle Sébastien », vieillard imaginaire dont il dessine les traits en masque de théâtre et qui vante les produits Viacroze par la plume de Léon Chancerel.

Les Propos de l’Oncle Sébastien
Les Propos de l’Oncle Sébastien : gazette de bonne entente commerciale paraissant six fois l'an, éditée par Viacroze à l'intention des dépositaires et collaborateurs de la maison. Imprimé, s.d. (© René Gabriel. Droits réservés)
Bar avec comptoir courbe, chaises et tables en tube métallique
Bar avec comptoir courbe, chaises et tables en tube métallique. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, 1932 (© René Gabriel. Droits réservés)

Un modernisme social

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Éléments RG : meubles avec liseré bleu. Dessin à la mine de plomb et au crayon de couleur, s.d. (© René Gabriel. Droits réservés)

Avec la crise des années trente, René Gabriel fait montre d'un souci accru d’économie et de gain de place, auquel s’ajoute l’objectif de la fabrication en série. Il conçoit des meubles composés de modules baptisés « éléments RG », dont les multiples assemblages et combinaisons possibles permettent d’optimiser de petits espaces. 

Car René Gabriel est un artiste socialement engagé ; à sa mort, Léon Chancerel soulignera dans son hommage funèbre que son ami a « voué sa vie à la création et à la diffusion d'un mobilier et d'un équipement susceptibles d'apporter le confort et la joie à ceux qui n'étaient pas des privilégiés de la fortune. »

Le mot « populaire » fait donc sens lorsque, en 1934, René Gabriel quitte Viacroze pour fonder les « Ateliers d’Art Populaire », à la même adresse que le centre d’art dramatique dirigé par Léon Chancerel.

Théâtre

René Gabriel s’est intéressé à l’espace théâtral assez tôt dans sa carrière, scénographiant dès 1927 des mises en scène de Louis Jouvet. Pour le théâtre, il invente des machineries sophistiquées, des scènes rondes ou rectilignes, des salles de spectacle, et même des costumes. Il réalise les programmes et les décors des « Comédiens Routiers », troupe fondée par Léon Chancerel au sein du mouvement scout, et travaille aussi pour le « Théâtre de l’Oncle Sébastien ».

Salle de théâtre avec scène surélevée. René Gabriel
Salle de théâtre avec scène surélevée. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, s.d. (© René Gabriel. Droits réservés)

Esprit d’enfance

Le Village des enfants : le « Théâtre municipal ». René Gabriel
Le Village des enfants : le « Théâtre municipal ». Dessin au crayon et à la gouache, 1937 (© René Gabriel. Droits réservés)

Car l’Oncle Sébastien, ancien porte-parole de Viacroze, s’est mué en effigie d’un théâtre pour enfants fondé par Chancerel. Le bonhomme est aussi devenu l’emblème d’une collection de livres pour la jeunesse, les « Albums de l’Oncle Sébastien », illustrés par René Gabriel.

Celui-ci n’a jamais eu d’enfant mais nombre de ses créations manifestent une proximité avec le monde de l’enfance, s’exprimant principalement dans ses papiers peints par des couleurs fraîches, des tracés clairs et des thèmes naïfs.

En 1937, René Gabriel construit le « Village des enfants » de l’Exposition internationale de Paris, décor rural de carton-pâte traversé d’une rivière, où les petits visiteurs peuvent déambuler.

Le Village des enfants, avec présence d'enfants. Jean Collas
Le Village des enfants, avec présence d'enfants. Tirage photographique, 1937 (© photographie Jean Collas. © René Gabriel. Droits réservés)

La notoriété

Pavillon de la France, Groupe des matières premières pour la parfumerie, à l’exposition internationale de New York
Pavillon de la France, Groupe des matières premières pour la parfumerie, à l’exposition internationale de New York. Dessin à la mine de plomb et à la gouache, 1939 (© René Gabriel. Droits réservés)

Au cours des années trente, René Gabriel expose régulièrement au Salon des Artistes Décorateurs (SAD) et, à partir de 1935, il participe chaque année au Salon des Arts Ménagers. L’Exposition internationale de 1937 à Paris, puis celle de New York en 1939, comprennent des pavillons, des halls et des stands entièrement aménagés et décorés par l’artiste.

Son modernisme sensible, encore marginal au milieu des années vingt, rencontre, une décennie plus tard, la tendance devenue majoritaire chez les décorateurs, convertis à l’épure mais rejetant le purisme froid d’une avant-garde radicale.

Pauvres et riches

En 1938, René Gabriel abandonne les Ateliers d’art populaire pour ouvrir son agence à Montparnasse. Maître incontesté du mobilier industriel de qualité, il fait distribuer ses meubles en bois blanc dans les grands magasins, tout en créant aussi de luxueux ensembles sur mesure pour une clientèle aisée.

Dès 1940, la guerre plonge dans le dénuement des milliers de sinistrés. En 1941, le Service des Constructions Provisoires commande pour eux du mobilier d’urgence. René Gabriel exécute alors un nombre considérable de dessins et de plans pour ce type d’équipements.

Chambre d’étudiant sous les combles. René Gabriel
Chambre d’étudiant sous les combles. Dessin au crayon et à la gouache, s.d. (© René Gabriel. Droits réservés)
Bureau d’un dirigeant, mobilier en bois ciré. René Gabriel
Bureau d’un dirigeant, mobilier en bois ciré. Dessin au crayon et à la gouache, s.d. (© René Gabriel. Droits réservés)

Consécration d’un visionnaire

Après la guerre, le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme (MRU) sollicite architectes et décorateurs pour redonner un cadre de vie aux plus démunis. Les meubles en série ont prouvé leur nécessité, ils connaissent un franc succès au SAD de 1946. René Gabriel est alors nommé président de la Société des Artistes Décorateurs. Le MRU fait appel à lui pour meubler les cités expérimentales construites après-guerre et, en 1947, il collabore avec Auguste Perret aux nouveaux appartements du Havre.

La même année, il devient chef d’atelier à l’École nationale des Arts décoratifs.

Mobilier pour sinistrés. © René Gabriel.
Mobilier pour sinistrés. Dessin à la mine de plomb sur calque, 1944 (© René Gabriel. Droits réservés)

Les dernières années de sa vie, René Gabriel travaille beaucoup pour l’hôtellerie, un univers aux contraintes familières de petits habitats temporaires meublés en série. En 1949, il supervise la section Hôtellerie du SAD et, la même année, il se voit décerner la Légion d’Honneur.

Postérité

Chambre avec mobilier combiné - René Gabriel
Chambre avec mobilier combiné, le tour de lit devenant table de travail. Dessin au crayon et à la gouache, s.d. (© René Gabriel. Droits réservés)

À la mort de René Gabriel, en 1950, ses idées avant-gardistes triomphent : les équipements modulaires sont devenus courants, les sobres meubles de la Reconstruction dégagent une esthétique intemporelle, prisée parce qu’indémodable.

Aujourd’hui, les intuitions de l’artiste se révèlent prémonitoires à travers le besoin croissant d’équipements pour la précarité et l’urgence, le rejet d’une technologie déshumanisante, ou encore la recherche d’une beauté dictée par les usages et portée par des matériaux simples – le credo des designers.

Retrouvez l'ensemble des archives de René Gabriel dans la bibliothèque numérique de PSL.

Focus conçu et rédigé par Catherine Geoffroy, chef du Pôle documentaire de l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs

En savoir plus

CHAUVIN, Élisabeth, GENCEY, Pierre, Utopie domestique : intérieurs de la Reconstruction, 1945-1955. Paris : Éd. Piqpoq ; Ville du Havre , 2014

CHAUVIN, Élisabeth, GENCEY, Pierre, Appartements témoins de la reconstruction du Havre. Bonsecours : Éd. Points de vues ; Ville du Havre, 2007

FERRET, Céline, René Gabriel, architecte-décorateur. Mémoire de DEA, Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, 2002 [consultable à la bibliothèque de l’EnsAD]

GENCEY, Pierre, Jacques Hitier, modernité industrielle. Paris : Éd. Piqpoq , 2012

GENCEY, Pierre, Marcel Gascoin : design utile. Paris : Éd. Piqpoq ; Ville du Havre , 2011

Art utile, blog de Pierre Gencey 

L’appartement témoin d’Auguste Perret et René Gabriel au Havre

À voir aussi : les céramiques conçues par René Gabriel à la Manufacture de Sèvres et les meubles créés par l’artiste au Musée des Arts Décoratifs.

+ SUR BLOG "ART UTILE" : http://art-utile.blogspot.com/search/label/GABRIEL

"Théorie de l'avant-garde" de Peter Burger (résumé)


Théorie de l'avant-garde de Peter Bürger 
 
Parue en 1974 en Allemagne, la Théorie de l'avant-garde de Peter Bürger a suscité d'importants débats. Elle n'avait pourtant pas été traduite en France jusqu'à présent. Sa publication donne l'occasion d'interroger l'héritage des avant-gardes dites "historiques" (surréalisme, dada, constructivisme russe) dans le contexte de l'art contemporain et, plus largement, de la culture de masse postmoderne, mais aussi de rendre compte de leurs échecs, de leurs "futurs passés" comme de leur réactivation problématique.

Peter Bürger construit un concept d'avant-garde caractérisé par une remise en cause durable de l'idéologie de l'autonomie esthétique et par une attaque massive contre l'institution art en tant que domaine social détaché de la pratique de la vie. Loin de composer un simple récit à propos des mouvements d'avant-garde dans leur diversité, Bürger tente de cerner les conditions de possibilité historique de leur apparition et l'unité sous-jacente de leurs démarches.

S'appuyant sur l'esthétique d'Adorno et, plus largement, sur la théorie de l'école de Francfort, son livre s'inscrit dans une herméneutique critique de la culture, qui prend la mesure des bouleversements introduits par les avant-gardes, tant dans la déconstruction de la "totalité organique" des oeuvres d'art (par le montage, le collage ou le rôle dévolu au hasard) que dans la redéfinition de leur rôle politique - réconcilier utopiquement technique et esthétique, art et praxis.

Les analyses que consacre Peter Bürger au concept d'oeuvre d'art, la distance qu'il prend à l'égard des thèses de Habermas ou de Benjamin, les éclairages historiques qu'il mobilise, comme son souci de distinguer l'autonomie artistique, du point de vue de son histoire et de son ancrage institutionnel, du contenu des oeuvres, font de ce livre un élément majeur pour toute approche des avant-gardes. Son examen de la situation créée par le projet inabouti des avant-gardes, sa description de ce qu'on désigne par "art contemporain" contribuent de façon décisive à la réflexion sur les pratiques artistiques d'aujourd'hui, leur rapport à l'institution art, à la culture et au marché.

À propos de l'auteur

Peter Bürger a enseigné la philosophie et la théorie de la littérature générale et comparée à l'université de Brême. Il est l'auteur de livres traduits dans plusieurs langues, parmi lesquels : Der französische Surrealismus (1971), Zur Kritik der idealistischen Astherik (1983) et La Prose de la modernité (1988), traduit chez Klincksieck en 1995, le seul accessible au lecteur français jusqu'à présent.

"LES ANARCHISTES DANS LA VILLE. Révolution et contre-révolution à Barcelone (1898-1937)" de Chris EALHAM (Recension de Freddy GOMEZ)

 SOURCE: http://acontretemps.org/spip.php?article876&fbclid=IwAR3SbkmBPnz3E8lDS3xG_19k3DYQe2qFegkOHY1-ubTJV8OxVC-1j2BkASQ

Nous avions souligné en son temps [1] l’importance historiographique essentielle de l’ouvrage de Chris Ealham La lucha por Barcelona, version espagnole d’Anarchism in the City : Revolution and Counter-Revolution in Barcelona (1898-1937). Nous en disions – et qu’on nous pardonne de nous citer – que le tableau que tirait l’historien britannique hispanisant de « la conflictualité sociale dans la capitale catalane au cours des quatre premières décennies du XXe siècle » était « impressionnant de pertinence ». Nous insistions également sur le fait que son analyse, « d’une part, de l’organisation de l’espace urbain barcelonais et de la volonté de contrôle des classes dangereuses, théorisée par une bourgeoisie catalaniste ralliée à la “République d’ordre”, et, de l’autre, des stratégies d’action directe mises en place par la CNT pour marquer son territoire, dress[ait] [à partir] d’un recensement détaillé des zones d’implantation de l’anarcho-syndicalisme barcelonais – les quartiers du centre historique (El Raval), ceux de la première périphérie (Sanz), ceux de la seconde périphérie (Hospitalet, San Adrían, Santa Coloma) –, […] une topologie originale d’une CNT où l’affrontement récurrent entre syndicalistes et “faïstes” recoup[ait] très précisément le statut social, mais aussi l’appartenance des militants à tel ou tel espace urbain ». Avant de conclure que tout cela, mais aussi « sa perception du processus révolutionnaire de l’été 1936 comme appropriation du territoire urbain et rupture avec “l’idéologie démocratique de domination” » ouvrait « des perspectives d’analyse tout à fait nouvelles ».

Dans sa préface à l’excellente traduction française que vient de nous donner Agone, Chris Ealham revendique l’influence qu’exerça sur son parcours et son travail de recherche « l’histoire sociale à la Thompson [2], c’est-à-dire “par le bas” (from below) ». Pour le cas, concernant ce livre, il s’agissait, dit-il, « de mettre au premier plan les motivations et les actions des gens ordinaires » en recréant « le monde social et la culture quotidienne de ces personne anonymes et des dépossédés qui se saisirent de l’anarcho-syndicalisme pour défendre leurs intérêts ». Au contraire des thèses d’Eric Hobsbawm qui, fidèle à une certaine orthodoxie marxiste, s’employa à démontrer, sans jamais le prouver, que l’anarchisme espagnol n’avait jamais été rien d’autre qu’une « rébellion primitive », essentiellement paysanne, Ealham perçoit à juste titre l’anarcho-syndicalisme comme relevant d’un mouvement fondamentalement urbain.

Cette histoire « par le bas » se doit, précise l’historien, d’être sociale, politique, culturelle, mais également « inscrite dans l’espace ». Admettant pour le coup l’influence d’Henri Lefebvre, à laquelle il aurait pu ajouter celle des situationnistes, Ealham tisse un maillage subtil entre les luttes proprement ouvrières – celles qui naissent et se propagent à partir des lieux de travail – et celles qui en débordent le cadre (luttes des chômeurs, grèves des loyers, actions de braquage et de réappropriation, « ces petits coups de feu de la guerre de classe » comme disait l’historien James C. Scott). Et, au-delà, il s’attache, brillamment, à démontrer en quoi les projets d’urbanisme bourgeois qui, depuis le « plan Cerdà » de 1854, n’ont cessé de bouleverser Barcelone n’ont eu, malgré leurs présupposés progressistes, d’autre but que de soumettre, contre le peuple, la ville aux seuls intérêts inégalitaires de la bourgeoisie, espagnoliste ou catalaniste, et des propriétaires fonciers. Sur ce plan, sa démonstration est, disons-le, remarquable. Elle atteste en quoi, pour utopique qu’elle soit sur le plan urbanistique, une « politique de rénovation urbaine conçue à des fins avouées de domestication de la population » débouche toujours sur un « cauchemar dystopique » aux conséquences toujours inattendues. 

 Dans le cadre d’une ville aussi rebelle que la Barcelone du premier tiers du XXe siècle – ce temps où la Rosa de foc (la Rose de feu) fut bien la capitale de l’anarcho-syndicalisme –, le doublement, entre 1900 et 1930, de sa population ouvrière avec l’arrivée massive d’une main-d’œuvre venant, pour le plus gros, de Murcie et d’Andalousie ne pouvait qu’augmenter les « paniques morales » des élites bourgeoises. Ealham décrit par le menu cette psychose de la « vie sauvage » des classes dangereuses qu’elles développèrent et les réponses ultra-répressives qu’elles engagèrent pour la « civiliser ». Mais, face à la cherté des loyers – qui augmentèrent en une seule année (1920) de 50 à 150 % – et à l’augmentation constante des denrées de première nécessité que ne compensait aucune mesure sociale, les conditions déplorables d’existence des émigrés de l’intérieur favorisèrent naturellement leur rapprochement presque immédiat avec l’anarcho-syndicaliste CNT, qui eut l’intelligence de comprendre, sans calculer les risques, l’intérêt qu’elle avait à tirer de la conscientisation de ces révoltés de la misère. Nombreux sont, en effet, les exemples que l’auteur nous donne de cette fraternisation en actes qui opéra dans les quartiers pauvres de la ville, les barrios. Organisés en « petites républiques », « par le bas, sans privilège ni hiérarchie, ils constituaient, écrit-il, un ordre socioculturel urbain largement autonome et des espaces assez libres où la police ne pénétrait presque jamais » tant y était faible l’autorité de l’État. D’où la réelle panique que cette convergence objective suscita chez les bourgeois. 

Les Anarchistes dans la ville nous offre, c’est acquis, un très large et fort précis panorama des mutations de la Barcelone du premier tiers du XXe siècle, et plus encore de ses quartiers populaires, le tout en s’attachant à nous instruire sur la vie quotidienne de ceux d’en-bas et les réponses collectives – culturelles, sociales et organisationnelles – qu’ils apportèrent, à partir d’eux-mêmes et pour eux-mêmes, aux défis de la question sociale. Mais ce n’est là qu’un seul de ses apports à l’historiographie générale. L’autre, c’est de nous éclairer sur la manière dont la CNT de ces temps, syndicat ouvrier par excellence, fit jonction naturelle avec des luttes non directement liées au monde du travail, celles des chômeurs et des locataires par exemple, sans se poser d’autres questions que celle de leur légitimité. Et ce faisant, de prendre le risque du conflit interne, notamment quand certains de ses activistes militants défendirent, par exemple, des pratiques de reprise individuelle, dont la gamme pouvait aller du simple vol à l’étalage pour ne pas crever de faim au braquage plus conséquent. L’impression qu’on en retire, c’est que la CNT savait être, dans le feu de l’action, autre chose qu’un syndicat ouvrier au sens strict du terme pour devenir une sorte d’objet non identifiable qui terrorisait l’adversaire précisément pour cela. C’est un peu comme s’il y avait diverses CNT dans la CNT et que son tout faisait unité des multiples pour configurer un mouvement de classe protéiforme capable de faire avancer, par tous moyens, la cause générale de la révolution sociale et de l’auto-émancipation du prolétariat.

Cette perspective est essentielle pour comprendre en quoi les lectures historiques d’une CNT réduite à sa dimension syndicale et aux conflits – idéologiques ou stratégiques – qui la traversèrent, peinent à saisir ce qui, en son sein, était toujours mouvant et induisait, par là-même, une réadaptation permanente de ses formes de luttes à la réalité des conditions d’exploitation et de domination du prolétariat et du sous-prolétariat de son temps. Cette élasticité la plaçait objectivement hors du champ balisé de l’affrontement de classe codifié, et surtout des compromis auxquels il aboutit souvent. Son ambition, elle pouvait la placer ponctuellement dans des victoires partielles, mais sans jamais perdre de vue l’objectif final : tendre le fil de la conflictualité sociale jusqu’à son point de rupture révolutionnaire.  

La fresque que nous offre Ealham atteste que cette « guerre urbaine » que connut la Rosa de foc dans le premier tiers du XXe siècle eut, au moins deux effets prolongés : elle accrut, d’une part, le dispositif général de répression contre le mouvement ouvrier, notamment sous la dictature du général Primo de Rivera (1924-1927), et déplaça, de l’autre, aux premiers temps de la République, du moins en Catalogne, le centre de gravité syndicaliste révolutionnaire de la CNT vers un anarcho-syndicalisme plus offensif sous influence plus nettement anarchiste. 

Corollairement, mal maîtrisée, cette « gymnastique révolutionnaire » qui connut son heure de gloire après l’instauration, en 1931, d’une République dite « de toutes les classes », accumula tant de ratés que, dans un chapitre intitulé « La militarisation de l’anarchisme » (1932-1936), Ealham en pointe les effets négatifs. Son jugement, dépourvu de tout romantisme révolutionnaire, est clair : ayant versé dans une stratégie purement putschiste, « les radicaux remplacèrent les luttes syndicales massives par leur propre violence ». Avant-gardiste jusqu’à la caricature, cette fuite en avant de type blanquiste reposait sur une telle surévaluation des seules capacités de l’anarchisme militant à faire la révolution que, logiquement, toute démarche tendant à favoriser l’unité ouvrière lui semblait inutile. C’est ainsi que, de défaite en défaite, la longue marche de l’insurrectionnalisme vers le communisme libertaire imposé ici ou là par décret et presque aussitôt déposé par la force des Gardes d’assaut releva, nous dit Ealham, d’une « politique du pire » infiniment réitérée et toujours fondée sur l’idée absurde que, plus les choses empireraient, plus la victoire finale serait éclatante. La vague de répression étatique qui s’abattit alors ne frappa pas les seuls acteurs ou partisans de la stratégie insurrectionnaliste, contestée à l’intérieur même de la CNT, mais, indistinctement, tout ce qui, de près ou de loin, pouvait être identifié comme libertaire. 


Il n’en est pas moins vrai, cela dit, que cette parenthèse insurrectionnaliste eut aussi pour effet, à travers les « groupes de défense » qui en furent souvent la pointe combattante, de préparer les esprits et les corps au grand affrontement qui vint, à Barcelone, le 19 juillet 1936 au matin quand, actionnées par les militants cénétistes, les sirènes des usines sonnèrent l’heure de l’assaut final. Il fallut un jour pour que la rébellion fasciste soit réduite, et un peu plus pour que la CNT, assurément dominante dans le combat, s’empare de sa ville. Elle ne le fit pas seule, certes, mais tous les participants à la résistance au fascisme encaserné reconnurent que sans elle, sans le messianisme révolutionnaire qui la caractérisait, la tâche eût été plus ardue.

Ainsi, la révolution sociale tant attendue vint d’une résistance à un coup d’État militaire contre une République qu’il fallait défendre alors qu’elle n’avait cessé de dériver vers l’ordre bourgeois en réservant ses coups les plus durs à ceux qui en contestaient les fondements mêmes. Tel est le premier maillon d’une longue chaîne de contradictions qui allait enserrer à tel point la CNT qu’elle n’en finirait jamais de sortir, au nom de l’unité antifasciste, de la ligne de « collaboration démocratique » que lui imposait l’état national du rapport des forces. A posteriori, il est toujours simple de rejouer le match en pointant les erreurs de tel ou tel de ses protagonistes, mais nous ne mangeons pas de ce pain-là. Une révolution sociale eut bien lieu qui porta si loin le feu de l’espérance qu’elle brille encore dans les révoltes du présent. Il est, finalement, des défaites plus porteuses que les victoires.

Quant à Barcelone, elle demeura la ville par excellence de cette révolution libertaire avant que, en mai 1937, la réaction stalino-républicaine n’y reprenne le pouvoir en y effaçant toutes les traces du bel été de l’anarchie. Les fascistes y arriveront deux ans plus tard pour la plonger, eux, dans une nuit de quarante ans.

Freddy GOMEZ

La Guerre d'Espagne: fausse guerre idéologique, vraie guerre préparant la guerre générale (Annie Lacroix-Riz)

 


Arachnoid (rock progressif français, 1979)

 


Elio Petri (1929-1982) et sa définition de la petite-bourgeoisie

      

Déclaration du réalisateur à Alfredo Rossi (dans Elio Petri, Florence, La Nuova Italia, coll. « Il Castoro Cinema »,

vendredi 18 octobre 2024

Sobre la persistencia de tópicos en la guerra civil. Réplica a Chris Bambery

 FUENTE: https://conversacionsobrehistoria.info/2024/06/21/sobre-la-persistencia-de-topicos-en-la-guerra-civil-replica-a-chris-bambery/

En la entrada anterior se publicó una reseña –traducción de la publicada en Counterfire–sobre el libro de Paul Preston ‘Perfidious Albion’ – Britain and the Spanish Civil War [Pérfida Albión: Gran Bretaña y la Guerra Civil Española], que ha suscitado un pequeño intercambio de correos entre los participantes de Debat polític i social, el grupo de discusión mediante mensajería impulsado en su origen por Espai Marx. Reproducimos a continuación, ligeramente editado, el correo en respuesta a esta reseña del historiador José Luis Martín Ramos.

José Luis Martín Ramos

Universitat Autónoma de Barcelona

 

Parece mentira, pero es así: a estas alturas todavía domina en determinada literatura, más política que historiográfica, un relato de la Guerra civil acuñado en los años cincuenta −los de la Guerra fría, el hecho no es casual− sobre todo a partir de la obra de Bolloten, con toques posteriores de Broué. Para esa literatura no ha existido el trabajo de una ya larga lista de historiadores, fundamentalmente españoles, que ha mejorado muy mucho nuestro conocimiento (últimamente los trabajos de Viñas, Alía Miranda, Moradiellos, Bahamonde, Hernández Sánchez… o los míos sobre Cataluña y el Frente Popular). Debe de ser una mezcla de pereza intelectual y soberbia ideológica. El texto es algo largo, lo advierto.

Empecemos con la sublevación y su derrota. Se inicia el 17 de julio en África y, de acuerdo con el plan de Mola, va extendiéndose por las guarniciones de la Península. En África se impone sin problemas −por eso es allí a donde vuela Franco−, pero no en la Península, donde se enfrenta a una reacción convergente y a veces combinada del movimiento obrero y de fuerzas del orden (guardia civil y guardia de asalto). Allí donde solo intervienen los trabajadores la oposición al golpe es masacrada (ejemplos: Granada, Cáceres, ciudades de Galicia…), mientras que donde se unieron ambas fuerzas la sublevación fue derrotada (Madrid, Barcelona, Bilbao…). En Valencia, la situación no se aclaró hasta después del desenlace de los enfrentamientos en Barcelona, cuando los mandos de la guarnición acataron al gobierno de la República. El mito de la derrota de los militares por los obreros es falso; eso está bien reflejado en las fotos de Centellas, con obreros, policías y guardias civiles luchando codo a codo, o en el episodio del desfile de la guardia civil por Vía Layetana rumbo a Plaza Urquinaona, que es cuando se dio por derrotada la sublevación en Barcelona.

 
Civiles y carabineros en el Carrer Ample de Barcelona. 
Imagen de la exposición ‘Pérez de Rozas. Crónica gráfica de Barcelona’ del AFB

La sublevación solo se impuso parcialmente en la Península y, a excepción de Sevilla y Zaragoza, no lo hizo en ninguna capital importante; triunfó en la España rural, así los sublevados no pasarían hambre, pero no consiguieron el control de la industria, con lo que a medio plazo su superioridad en equipo −el de la Legión y los Regulares− estaba destinada a extinguirse. Durante algunos días hubo una situación de incertidumbre, con el fracaso del intento de asalto a Madrid por parte de Mola, hasta que el apoyo de Mussolini y Hitler proporcionó a Franco la cobertura aérea y marítima y los medios (aviones de transporte de tropas, barcos) para trasladar el ejército de África al Sur de la Península, con lo que un golpe a punto de fracasar se convirtió en guerra civil (algo previsto por Mola, lo de la guerra civil). No se impuso, pero si desestabilizó de manera importante al Estado republicano, que perdió el control parcial o total en algunos territorios: total en Asturias, donde las instituciones republicanas se desvanecieron, y en Vizcaya por el comportamiento «soberanista» del PNV; parcial con un grado diverso de afectación en el resto del territorio republicano. Esa pérdida de control produjo situaciones de conflicto entre una parte del movimiento obrero (CNT y POUM) y las instituciones republicanas.

¿Esa pérdida de control fue una revolución o el inicio de una revolución? El relato tradicional anarquista, trotskista o «poumista» afirma que así fue. Broué lo identificó como una situación de doble poder, haciendo el parangón con la Rusia de 1917. Hay que examinarlo en concreto: en Vizcaya, desde luego, no hubo ninguna revolución; en Madrid tampoco, ni siquiera se produjeron colectivizaciones importantes de las pocas industrias de la capital; en el País Valenciano la situación de incertidumbre se alargó un poco más, y donde la CNT impuso su proyecto de revolución fue únicamente en la provincia de Castellón. ¿Qué pasó en Cataluña? En Cataluña en la noche del 21 la CNT debatió en Barcelona, en asamblea regional improvisada, qué había de hacerse. Durante los combates las organizaciones obreras se adueñaron de las armas y municiones existentes en el Cuartel del Bruc y en los cuarteles de Sant Andreu; Companys, prudentemente, decidió no evitar esa incautación, lo que habría obligado a un enfrentamiento a tiros entre los trabajadores armados y la guardia de asalto y guardia civil, un enfrentamiento sobre el que no tenía garantías de imponerse, y tampoco quería Companys enfrentarse con las organizaciones obreras. Decidió negociar con ellas.

La CNT discutió y rechazó la propuesta de Garcia Oliver de «ir a por todas», es decir, proclamar la revolución social (García Oliver se quedó solo: no lo apoyó Durruti, ni Abad de Santillán, y solo Escorza hizo un comentario críptico que fue en apoyo de García Oliver). La CNT descartó desencadenar la revolución social y acordó pactar con la Generalitat, con Companys, no una dualidad de poder sino una división de funciones en el marco de una nueva correlación en el ejercicio del poder: un Comité Central de Milicias Antifascistas (CCMA), integrado por CNT, FAI, UGT, PSUC (se constituyó el 22-23), POUM, ERC y AC (solo quedó fuera Unió Democrática), asumiría la formación de las columnas de milicias −en las que se integrarían oficiales leales− para dirigirse a tomar Zaragoza y organizar patrullas de vigilancia en Barcelona y resto de ciudades y pueblos; es decir, asumiría la función militar y el Gobierno de la Generalitat mantendría la función de la administración civil, con un detalle importante, la Banca controlada por la UGT quedaría al servicio del Gobierno de la Generalitat y no del CCMA.

 
Primera reunión del Comité Central de Milicias Antifascistas 
de Cataluña el 21 de julio de 1936 (foto: Estel Negre)

Con el control de la calle se produjo también la ocupación de las grandes fábricas y almacenes de venta y de algunos talleres medianos, y la formación de comités de control obrero en el sector industrial y comercial: fue el proceso de «colectivización», que en realidad fue un proceso de incautación por parte de los sindicatos. Esa dualidad de funciones estuvo afectada por los conflictos de poder derivados de la nueva correlación política y sindical, dada la concentración en las dos grandes centrales de toda la representación sindical, a excepción del campo, donde la Unió de Rabassaires siguió siendo mayoritaria.

El verano de 1936 resultó muy agitado en la retaguardia y muy negativo en el frente. Las milicias que sustituyeron necesariamente a un ejército descompuesto por la sublevación no fueron capaces de romper el frente de Aragón ni marchar sobre Zaragoza; se produjo entonces una situación que resultó absolutamente contraproducente para el desarrollo de la guerra: el frente se fragmentó en áreas dominadas por milicias partidistas, sin mando unificado, renunciando de hecho a atacar y centrándose en mantener la línea alejada de Cataluña. El CCMA nunca se impuso como autoridad central real, su autoridad no fue más allá del Barcelonés y territorios cercanos, gestionando los salarios de las empresas colectivizadas, la compra de armas y municiones para las milicias… La confirmación de que sería una guerra larga llevó a poner fin a la dualidad de funciones y a la formación en septiembre de un gobierno de unidad en Cataluña con un programa básico pactado entre CNT-FAI y UGT-PSUC , que incluía los modos y límites de la colectivización, la reorganización de la seguridad interior, la formación de un ejército que sustituiría a las milicias de partido, el reconocimiento de una sola administración y un solo gobierno, con gobiernos locales compartidos por las fuerzas del gobierno de unidad.

Poco antes se había constituido también un gobierno de unidad de la República, presidido por Largo Caballero, con un programa semejante; gobierno que se trasladó a Valencia ante el peligro de la caída de Madrid en poder de Franco. En noviembre la CNT se incorporó al gobierno de Largo Caballero para gran escándalo de los anarquistas “puros”, cono Emma Golden. Las milicias no paraban de retroceder ante la Legión y los Regulares, y desde Talavera de la Reina hubo un retroceso en desbandada.

Con el control de la calle se produjo también la ocupación de las grandes fábricas y almacenes de venta y de algunos talleres medianos, y la formación de comités de control obrero en el sector industrial y comercial: fue el proceso de «colectivización», que en realidad fue un proceso de incautación por parte de los sindicatos. Esa dualidad de funciones estuvo afectada por los conflictos de poder derivados de la nueva correlación política y sindical, dada la concentración en las dos grandes centrales de toda la representación sindical, a excepción del campo, donde la Unió de Rabassaires siguió siendo mayoritaria.

El verano de 1936 resultó muy agitado en la retaguardia y muy negativo en el frente. Las milicias que sustituyeron necesariamente a un ejército descompuesto por la sublevación no fueron capaces de romper el frente de Aragón ni marchar sobre Zaragoza; se produjo entonces una situación que resultó absolutamente contraproducente para el desarrollo de la guerra: el frente se fragmentó en áreas dominadas por milicias partidistas, sin mando unificado, renunciando de hecho a atacar y centrándose en mantener la línea alejada de Cataluña. El CCMA nunca se impuso como autoridad central real, su autoridad no fue más allá del Barcelonés y territorios cercanos, gestionando los salarios de las empresas colectivizadas, la compra de armas y municiones para las milicias… La confirmación de que sería una guerra larga llevó a poner fin a la dualidad de funciones y a la formación en septiembre de un gobierno de unidad en Cataluña con un programa básico pactado entre CNT-FAI y UGT-PSUC , que incluía los modos y límites de la colectivización, la reorganización de la seguridad interior, la formación de un ejército que sustituiría a las milicias de partido, el reconocimiento de una sola administración y un solo gobierno, con gobiernos locales compartidos por las fuerzas del gobierno de unidad.

Poco antes se había constituido también un gobierno de unidad de la República, presidido por Largo Caballero, con un programa semejante; gobierno que se trasladó a Valencia ante el peligro de la caída de Madrid en poder de Franco. En noviembre la CNT se incorporó al gobierno de Largo Caballero para gran escándalo de los anarquistas “puros”, cono Emma Golden. Las milicias no paraban de retroceder ante la Legión y los Regulares, y desde Talavera de la Reina hubo un retroceso en desbandada.

Con el control de la calle se produjo también la ocupación de las grandes fábricas y almacenes de venta y de algunos talleres medianos, y la formación de comités de control obrero en el sector industrial y comercial: fue el proceso de «colectivización», que en realidad fue un proceso de incautación por parte de los sindicatos. Esa dualidad de funciones estuvo afectada por los conflictos de poder derivados de la nueva correlación política y sindical, dada la concentración en las dos grandes centrales de toda la representación sindical, a excepción del campo, donde la Unió de Rabassaires siguió siendo mayoritaria.

El verano de 1936 resultó muy agitado en la retaguardia y muy negativo en el frente. Las milicias que sustituyeron necesariamente a un ejército descompuesto por la sublevación no fueron capaces de romper el frente de Aragón ni marchar sobre Zaragoza; se produjo entonces una situación que resultó absolutamente contraproducente para el desarrollo de la guerra: el frente se fragmentó en áreas dominadas por milicias partidistas, sin mando unificado, renunciando de hecho a atacar y centrándose en mantener la línea alejada de Cataluña. El CCMA nunca se impuso como autoridad central real, su autoridad no fue más allá del Barcelonés y territorios cercanos, gestionando los salarios de las empresas colectivizadas, la compra de armas y municiones para las milicias… La confirmación de que sería una guerra larga llevó a poner fin a la dualidad de funciones y a la formación en septiembre de un gobierno de unidad en Cataluña con un programa básico pactado entre CNT-FAI y UGT-PSUC , que incluía los modos y límites de la colectivización, la reorganización de la seguridad interior, la formación de un ejército que sustituiría a las milicias de partido, el reconocimiento de una sola administración y un solo gobierno, con gobiernos locales compartidos por las fuerzas del gobierno de unidad.

Poco antes se había constituido también un gobierno de unidad de la República, presidido por Largo Caballero, con un programa semejante; gobierno que se trasladó a Valencia ante el peligro de la caída de Madrid en poder de Franco. En noviembre la CNT se incorporó al gobierno de Largo Caballero para gran escándalo de los anarquistas “puros”, cono Emma Golden. Las milicias no paraban de retroceder ante la Legión y los Regulares, y desde Talavera de la Reina hubo un retroceso en desbandada.

 
Jaume Aiguadé (ERC), y los anarquistas Federica Montseny y Juan García Oliver, 
ministros del gobierno de Largo Caballero, en octubre de 1936

En octubre podría haber caído Madrid y con ello se habría precipitado la derrota de la República. No se produjo gracias a la formación de los gobiernos de unidad y el paso de las milicias de partido o sindicato al Ejército Popular de la República. Y gracias también a que por fin la República consiguió ayuda militar exterior, la de la URSS. No es cierto que Stalin dudara en apoyar a la República, lo hizo política y económicamente, con exportaciones de grano y subsistencias; tardó más en hacerlo con tanques, aviones y armas pesadas de combate, a la espera de que Alemania e Italia cesaran la intervención y la Francia del Frente Popular vendiera a la República las armas que esta le pedía. El problema de la URSS era que se cumpliera el sueño húmedo de la derecha británica −no solo de los escasos fascistas de Mosley, sino de la mayoría del Partido Conservador−, el apaciguamiento de Hitler en Europa Occidental mediante el ataque de Alemania a la URSS. Finalmente, ante el peligro inminente de caída de la República y la confirmación de la inacción francesa, Stalin envió los tanques y los aviones que equilibraron la batalla de Madrid y la cronificaron hasta el fin de la guerra. Por cierto, todas las ayudas, tanto las de Alemania e Italia como la soviética fueron remuneradas; la República nunca lo quiso de otra manera y Hitler y Mussolini tampoco lo quisieron. Así, las reservas de oro del Banco de España se destinaron a pagar los suministros y procurando mantenerlas a salvo de una caída de Madrid o de Valencia. Y no solo se transfirieron reservas de oro a Moscú, también se envió una cantidad importante al Sur de Francia, que, como se temía, al final de la guerra fue a parar a manos de Franco.

Resumiendo lo dicho: no hubo revolución, sí descontrol, periodo de incertidumbre y confusión y finalmente, a partir del otoño, implementación de un programa frentepopulista radicalizado con toques de economía de guerra y organización de guerra para una contienda larga.

Vuelvo a Cataluña, para llegar a los hechos de mayo. El programa pactado en octubre solo se cumplió parcialmente. La CNT y el POUM bloquearon la militarización de las milicias y la CNT en particular impidió la llamada a quintas. Un hecho complejo que ahora no puedo explicar sin caer en esquematismos; en esencia la CNT consideraba que para desarrollar una guerra defensiva bastaba con las milicias y, por otra parte, la gente se resistía a ser llamada al frente, ya fuera mediante leva o mediante nuevas campañas de captación de voluntarios, que fueron un fracaso después del verano, cuando se desvaneció la ilusión de una rápida victoria sobre el fascismo. El retorno de héroes del frente se convirtió en retorno de muertos; la fiesta de la redistribución de julio y agosto en la escasez de subsistencias.

 
Otoño de 1936: vendimia en la colectividad de Mas de las Matas (Teruel)
(foto del libro ‘Masinos en la encrucijada social. Mas de las Matas, 1900-1950’, 
de Fermín Escribano Espligares y Miguel Íñiguez)

La reorganización de la seguridad interior no se produjo por la oposición de las patrullas de control de la CNT, el POUM y buena parte de los patrulleros de ERC y ACR. Se deterioró la situación en el campo por el conflicto provocado por las colectivizaciones forzosas, rechazadas por rabasaires, arrendatarios y pequeños campesinos. Conflictos duros en las comarcas del Ebro que culminaron en los incidentes de La Fatarella a finales de enero de 1937 y otros menos conocidos en Centelles, cerca de Vic, en marzo.

Se enconó la pugna entre una CNT que seguía siendo ligeramente mayoritaria, pero de ninguna manera hegemónica, y la UGT que tendía a equilibrar efectivos con CNT, pero siempre por debajo de ella, sobre todo en el sector de la producción y distribución de subsistencias.

La prolongación de la guerra avivó los debates en el seno de unos gobiernos de unidad cada vez más divididos. En Cataluña eso desembocó en diciembre en una remodelación del gobierno que supuso la exclusión del POUM, chivo expiatorio por los incumplimientos de los acuerdos de octubre y por su constante, y pública, oposición a los mismos.

A comienzos de la primavera de 1937, con la resaca de los enfrentamientos campesinos y sindicales y la crisis del gobierno de Valencia por las discusiones sobre la política militar y el hundimiento del frente asturiano, la tensión política en Cataluña se disparó, polarizada entre CNT-FAI y UGT y PSUC.  En el campo anarquista se formó una fronda de protesta, integrada por quienes rechazaban participar en los gobiernos de la Generalitat y de la República, los sindicatos de la administración y el transporte y las patrullas de control que se negaban a disolverse en un nuevo Cuerpo Único de Seguridad Interior; también intervenían los comités de barrio anarquistas, formados a partir de julio de 1936, que competían con los principales sindicatos de la CNT (textil, metal, construcción) por el control de las armas y la supremacía en la organización. Agustí Guillamón sostiene que el líder intelectual de esta red de barrios era Escorza.

Cuando los que discuten van armados es posible que la discusión acabe a tiros. En los últimos días se precipitó la situación. Primero fue el asesinato de Roldán Cortada, cuadro dirigente del PSUC, por u  control anarquista de carreteras, el 25 de abril; dos días más tarde,  el asalto de fuerzas de orden público a Puigcerdá para recuperar el puesto fronterizo de manos de un comité anarquista encabezado por Antonio Martín, muerto en el tiroteo. Y la espiral de acción/reacción no se detuvo; las fuerzas de orden de la Generalitat hicieron una redada en L’Hospitalet en busca de los asesinos de Cortada, con resistencias y tiroteos esporádicos.

 
Barricadas en la Plaça de la República [Sant Jaume], en Barcelona, 3-7 de mayo de 1937 
(foto:  Fons Brangulí / ANC1-42-N-34822)

En esa situación se produjo el incidente de la interferencia de la conversación telefónica entre Azaña y Companys por el comité anarquista que controlaba el edificio central de Telefónica en Barcelona. Era grave y ponía de manifiesto el riesgo de ese control en la situación de guerra. Tarradellas, «primer Conseller», es decir, jefe del gobierno de unidad, decidió lavarse las manos, para no crear un enfrentamiento con los anarquistas y dejó en manos del Conseller de Interior, Artemi Aiguader, de ERC, el manejo del asunto. Aiguader envió al Director General de Seguridad, Rodríguez Salas, del PSUC, al frente de una patrulla de guardias de asalto para tomar el control de la Central Telefónica en nombre del Govern de la Generalitat; los anarquistas se opusieron y entonces se desencadeno una rebelión general de grupos anarquistas, que no exactamente de la CNT-FAI. No hubo «provocación estalinista», sí hubo una situación de tensión ante la que Tarradellas se puso de lado, división interna en la CNT-FAI, y en el desencadenante final imprudencia del comité anarquista de Telefónica –como poco– en la interceptación de la conversación Azaña-Companys. Y finalmente hubo rebelión anarquista, es decir, de determinados grupos y segmentos anarquistas.

Ante eso el POUM se echó al monte no solo sumándose a la rebelión, sino pretendiendo «orientarla políticamente» proponiendo al Comité Regional de la CNT tomar el poder en Cataluña; lo que el CR de la CNT rechazó, aunque quiso aprovechar la situación para presionar por un cambio en el Govern con aumento de la presencia anarquista o un gobierno sindical exclusivo.

La rebelión desbordó a la Generalitat. Companys pidió ayuda de fuerza de orden al Gobierno de la República. Largo Caballero vaciló, por motivos semejantes a los de Tarradellas –no enfrentarse a los anarquistas– y decidió probar una mediación enviando a Barcelona a sus ministros anarquistas: García Oliver y Federica Montseny; fue en balde, los grupos en rebelión no les hicieron caso. Se perdieron tiempo y vidas y finalmente se tuvo que enviar a fuerzas de orden público del Gobierno de la República, con lo que acabó la rebelión.

El episodio tuvo muchas consecuencias (muertos y heridos aparte). La intervención del gobierno de la República significó que el control del orden público en Cataluña pasaba temporalmente a dicho gobierno, de acuerdo con el estatuto. Y, con ello, la intervención del fiscal de la República que abrió diversos expedientes individuales y uno colectivo contra el POUM; no lo hizo contra CNT-FAI porque estas como tales no impulsaron la rebelión… y porque eso habría significado una grave crisis política general en la República. Pagó los platos rotos la dirección del POUM, porque ella sí se comprometió públicamente con la rebelión y llamó desde ella a un cambio de poder en Cataluña por la fuerza.

La vacilación de Largo Caballero se sumó a las disensiones que se venían arrastrando en el Gobierno de la República y en el PSOE-UGT y Azaña, que padeció los hechos de mayo en su residencia del Parque de la Ciudadela en Barcelona, le retiró la confianza a Largo Caballero (léase la Constitución de la República). De las negociaciones salió el encargo de formar nuevo gobierno a Negrín, del ala centrista del PSOE (no de la derecha, que era la de Besteiro) y este quiso formar nuevo gobierno con las mismas formaciones, incluso con Largo Caballero en él. Largo lo rechazó –o jefe de gobierno o nada– y ante ello la UGT, dividida, se abstuvo y la CNT hizo lo mismo. El nuevo gobierno no significó ningún giro derechista y en 1938 los sindicatos volvieron a ingresar en él. En Cataluña también se formó un nuevo gobierno, pero la CNT-FAI, asimismo dividida, no quiso participar y cuando en la segunda mitad de 1938 quiso reintegrarse la oposición del PSUC y de Companys lo impidió. Tampoco hubo giro derechista en Cataluña; es más, el PSUC rechazó la propuesta de ERC de dar marcha atrás en las colectivizaciones e impulsó una nueva ley agraria y una ley de municipalización de la vivienda, cuya ejecución torpedeó Tarradellas.

 
Vicente Uribe, Juan Negrín, Indalecio Prieto, Jesús Hernández y el general Vicente Rojo en el acto de despedida, en Barcelona, de las Brigadas Internacionales (1938)(foto: Emilio Rosenstein/CDMH)

La guerra siguió y la economía y la política de guerra se endureció. Entre mayo de 1937 y marzo de 1939 pasó mucho tiempo y pasaron muchas cosas; pero el publicismo al que responde la interpretación de ese artículo obvia ese tiempo, porque siente que el protagonismo ya no corresponde al POUM, a la disidencia anarquista y a la revolución que se han inventado.

 

Algunas apostillas concretas, por orden de exposición en el texto:

  • el envío de armas soviéticas –no rusas– «nunca llegaron a la escala de lo que Hitler y Mussolini proporcionaron a Franco»; lo sugieren como demérito de la URSS pasando por encima la potencia militar e industrial de unos y otros. En ese tiempo la URSS no podía competir con Alemania y con Italia por separado, y menos si se sumaban. Por otra parte los envíos soviéticos tuvieron que enfrentarse al bloqueo del Mediterráneo por franceses, británicos e italianos, que los dificultaban; se tuvo que inventar una nueva ruta desde el Báltico hasta la costa atlántica francesa, con aviones y armas pesadas por piezas, que entraban en España a través de Portbou, por tren, cuando el gobierno francés hacía la vista gorda. Finalmente en 1938 la URSS tuvo que hacer frente a una pequeña guerra en la frontera chino-siberiana, que Stalin temió que pudiera ser el inicio de una intervención extranjera; toda la disposición de armamento se dejó inmovilizada; cuando se conjuró el peligro se reanudaron los envíos, por la ruta del Báltico porque la del Mediterráneo estaba cerrada; ya no llegaron a tiempo, la traición de Casado, Miaja, Besteiro y Cipriano Mera, es decir, de una parte del mando profesional del ejército republicano, el ala derecha del PSOE y la CNT de la región Centro,  impidió mantener la resistencia en espera de la llegada de los nuevos envíos.
  • afirma que Helen Graham dice: «la política de Negrín era consolidar una economía liberal de mercado y un sistema de gobierno parlamentario»; es por cierto la única referencia historiográfica que se considera, después de que se haya publicado una biografía de Negrín (Moradiellos), la trilogía de Viñas, etc. etc. Pues bien, eso que dice HG es entre inexacto o falso –según la dureza de la crítica que se le quiera hacer–; el objetivo de Negrín era defender la República democrática, constituida en 1931, que era el denominador común de republicanos y antifascistas;  era una República parlamentaria, que no se planteaba el cambio de sistema económico, pero admitía formas de regulación del mercado en función del interés social; en defensa de ese denominador común y contra el aventurerismo de quienes pretendían romper el eje republicano-antifascista por cualquiera de sus partes, Negrín consideró que las transformaciones sociales que habrían de producirse solo se podían impulsar tras la victoria, no obstante aceptó la permanencia de las leyes de colectivización o las leyes agrarias decretadas en Cataluña y discutirlas, en cualquier caso, también después del fin de la guerra.
  • en la batalla de Teruel (febrero de 1938) no se separó Cataluña del resto de la España republicana; eso no ocurrió, por tierra, hasta la toma de Vinarós, en abril; el autor no tiene siquiera la más mínima noción de geografía española.  La batalla del Ebro tenía una razón y un objetivo político que era razonable: presionar a Francia y también a Gran Bretaña –en este caso hasta donde fuera posible– para que pasaran a dar apoyo activo a la República ante la eclosión de la crisis de los Sudetes y la ofensiva expansionista de Hitler. No se alcanzó el objetivo por culpa de la traición de Chamberlain-Daladier. Desde luego, el esfuerzo que se tuvo que hacer fue grande y no se pudieron compensar las pérdidas con el giro político perseguido; pero enfocar la cuestión desde la queja nacionalista –del nacionalismo catalán en este caso– de dejar a Cataluña desprovista de medios militares para impedir su conquista es una manera muy sui generis de analizar la Guerra civil.
  • el rechazo de las ofertas marroquíes es otro de los tópicos. Para empezar, el autor lo sitúa en el contexto de su crítica a Negrín, pero nada tiene que ver con Negrín, fue una cuestión suscitada en 1936 en los primeros meses de la guerra. Y una cuestión exagerada, porque todo sirve al parecer para criticar a Negrín y los malvados comunistas; la fiabilidad de los «nacionalistas» marroquíes era reducida y en efecto la oferta se producía en un momento en que todavía se esperaba un posicionamiento positivo por parte de Francia. Por otra parte el tópico da por hecho que tal rebelión se habría producido con éxito y no habría sido aplastada por el ejército francés y el ejército de Franco, que hubieran compartido un objetivo común.
  • lo de la guerra de guerrillas es una tontería absoluta. Pretender que en la Guerra civil se podía sustituir el enfrentamiento convencional por la guerra de guerrillas es de una ignorancia supina. Decir que no hubo ningún decreto sobre la tierra a los jornaleros de la España del Sur supuestamente para conseguir que se levantaran contra el ejército sublevado, un despropósito absoluto. Por otra parte, la República sí había legislado sobre la tierra y en la guerra civil se aplicó esa legislación con intensidad (reforma agraria); también se legisló en Cataluña, a favor de rabassaires, arrendatarios y pequeños campesinos.
  • que el juicio contra el POUM fue una reedición española de los Juicios de Moscú es mentira y una infamia absoluta, por mucho que lo hayan dicho y escrito Gorkin y otros. El juicio de la dirección del POUM fue un juicio con garantías y ahí están las sentencias para refrendarlo; los documentos falsos sobre  el colaboracionismo del POUM con el fascismo no fueron tomados en cuenta por el tribunal. Mejor se haría reconociendo que en mayo de 1937 el POUM, como partido, violó la legalidad republicana mediante una acción armada en tiempos de guerra. La reacción republicana no estuvo carente de sentido, ni fue arbitraria. Y finalmente el propio gobierno republicano de Negrín puso en libertad a los condenados –todos ellos con penas de cárcel– en el momento de la retirada de Cataluña. Lo de Nin fue otra cosa, y ciertamente fue una intervención extemporánea y criminal de la NKVD, o más precisamente de Orlov. Es mentira que Negrín no hiciese nada, por el contrario intentó averiguar lo que pasaba junto con Zugazagoitia, pero no lo consiguió; la reacción de Negrín fue reorganizar los servicios de información republicanos e impulsar el SIM, dirigido por socialistas, y alejar a los agentes soviéticos del sistema de información republicano.

PD.: Obviamente no había colusión del POUM con el fascismo y los hechos de mayo no fueron un levantamiento fascista, como la propaganda comunista de la época sostuvo. Pero sí había en Cataluña una «quinta columna» y alguien pudo tener intención de pescar en río revuelto. Franco dijo que había tenido agentes en los sucesos; no necesariamente fue una provocación o una baladronada, entre los heridos en Barcelona La Vanguardia cita a un tal Trillo-Figueroa, tío de Federico Trillo-Figueroa, miembro activo del régimen como toda su familia en la postguerra. Cuando lo intenté no pude acceder a archivos del Servicio de Información franquista, y ya no le seguí la pista, pero lo cito siempre que puedo, a ver si alguien se anima.

  • Final. Eso de que el desenlace de los hechos de mayo fue una de las razones por las que Barcelona cayó sin lucha es otra infamia, pero también es una cierta confesión de parte, puede ser que inconsciente. Entre mayo del 37 y enero del 39 pasaron muchas otras cosas que explican el desenlace de la decisión de abandonar Barcelona sin lucha, sin pretender repetir en la capital catalana el «No pasarán». Explicarlo sería explicar todos esos meses de guerra: el cansancio de la guerra, el hambre, la constatación de la superioridad franquista en equipo, las maniobras de una parte de los republicanos (empezando por Azaña) y sobre todo de los nacionalistas catalanes (ERC, Tarradellas) para poner fin a la resistencia y pretender una paz «negociada» con Franco  –eso sí que causó desafección y desmoralización de combate en buena parte de la población barcelonesa– y, finalmente, el desgaste sufrido en el combate de la batalla del Ebro, que obligaba a retirarse para reagrupar fuerzas y no a plantarse para entablar una nueva batalla que podría ser la derrota definitiva. La confesión de parte: sí hubo una parte de la militancia anarquista que empezó a considerar que aquella guerra no iba con ellos; fue una consideración miope, como la de Besteiro, como la de Cipriano Mera; para otros también hubo algo de oportunismo, de caer en la trampa de la solidaridad rojinegra frente al comunismo como los que pasaron a aceptar e incluso a colaborar con el régimen franquista tras la derrota de la República.

Referencias:

Martín Ramos, J. L. (2015), El Frente Popular: victoria y derrota de la democracia en España. Pasado & Presente, Barcelona.
— (2018), Guerra y revolución en Cataluña. Crítica, Barcelona

 

Espai Marx 

Fuente: Conversación sobre la historia