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mercredi 27 mars 2024

"Désir d'absolu" dans deux lettres de Guy Debord à Hervé Falcou

Que dire du mot "absolu" sinon qu'il nomme ce qui n'est accessible que par une expérience rare intraduisible: une expérience que l'on peut donc qualifier de mystique avec des sentiments océaniques qui saturent et produisent toutes sortes de vertiges; on peut les nommer sous les catégories d'illimité, de néant ou de dieu. Par ce genre d'expériences on pourrait dire que l'on est au sens figuré dans le registre de l'ivresse et de la gueule de bois, mais concernant Debord on peut le dire aussi au sens propre car l'alcool est moteur d'absolu comme il l'évoque à la fin de sa vie dans Panégyrique (en 1993): 

J'ai d'abord aimé, comme tout le monde, l'effet de la légère ivresse, puis très bientôt j'ai aimé ce qui est au-delà de la violente ivresse, quand on a franchi ce stade: une paix magnifique et terrible, le vrai goût du passage  du temps.

Le "désir d'absolu" se produit avec une spéciale acuité pour nombre d'entre nous à l'adolescence et durant la vingtaine, en somme quand on est neuf face au monde et que l'on voudrait le bouffer en entier. Les attendus étant déçus cela peut conduire à des tentatives de suicide. Ce fut peut-être son cas, les assertions suivantes au "désir d'absolu" dans deux lettres à Falcou coïncident avec des tentatives précoces de sa part (il mourra suicidé mais en 1994, pour ne pas continuer à souffrir d'une maladie très invalidante et sans rémission possible).

 

 Lettre de Guy Debord à Hervé Falcou, (premier semestre?) 1950:

Rimbaud me plaît beaucoup actuellement. Pas tout ce qu’il a écrit, mais ce silence.
Ce silence terrifiant.
Je comprends maintenant combien il était écœurant de supposer cette chasse spirituelle. 
Le plus difficile est mon désir d’absolu. Il ne me laisse plus aucune solution.

Le Marquis de Sade à des yeux de fille, p. 63

 

Lettre de Guy Debord à Hervé Falcou, décembre 1950:

 Cela devait s’appeler désir d’absolu. Bien peu de minutes m’ont satisfait et je n’ai pas pu bâtir sur elles ma vie.   

Le Marquis de Sade à des yeux de fille, p.74