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dimanche 7 avril 2024

"La situation de la classe laborieuse en France", Antoine Vatan, 2023

SOURCE: https://www.initiative-communiste.fr/articles/culture-debats/la-situation-de-la-classe-laborieuse-en-france/

Les éditions Delga ont publié un livre d’Antoine VATAN : « La situation de la classe laborieuse en France »

Il s’agit pour nous d’un livre majeur tant pour éclairer de façon scientifique la situation des travailleurs en France que pour la remarquable maîtrise des concepts de la critique de l’économie politique , donc du matérialisme historique, par l’auteur.

Nous avons écrit travailleurs pour laisser le lecteur découvrir qu’il s’agit en réalité de prolétaires.

S’appuyant sur la définition exacte du terme : celui qui n’ayant que ses bras et/ou  sa tête pour toute richesse doit se vendre – vendre sa force d travail-  contre un salaire.

Et Antoine Vatan  élargit encore le champ du prolétariat en montrant d’une part la baisse du nombre de travailleurs indépendants et d’autre part que ce travailleur est en réalité dépendant,  insérer dans les mailles des monopoles, du capital.et  que de plus  les ‘indépendants’ sont en réalité  soumis à une exploitation encore plus féroce, forcés d’avancer le capital constant  (leur scooter ou leur voiture par exemple) nécessaire à leur activité.

Si ce rappel est  l’essentiel, il ya dans ce livre beaucoup plus. Ce que montre Antoine Vatan c’est qu’au delà d’une très mince couche de cadres  très supérieurs ou dirigeants dont la seule fonction est de contrôler le travail des autres, qu’Antoine Vatan appelé fort justement les ‘Kapos,’ et qui vivent de la plus-value de ceux qu’ils oppriment, il y a une sorte de communauté de destin salarial entre tous les prolétaires du plus humble employé ou ouvrier non qualifié jusque’à l’ingénieur ou cadre. Cette relative solidarité Antoine Vatan la démontre, en utilisant  de façon pertinentes les statistiques disponibles , et montrant que pour toutes les couches de salariés il ya eu baisse du niveau de vie et donc paupérisation  et que cette baisse a touché plus  particulièrement  les salaires les plus élevés – le 9ème  décile – entre 1980 et 2017.

Poussant jusqu’au bout les analyses Antoine Vatan dresse un tableau très réaliste et qui surprendra bien des lecteurs, de la situation du prolétariat en France sans omettre aucune des contradictions qu’il peut bien évidemment y avoir entre un cadre et un salarié non-qualifié.

Mais il a y plus encore. Antoine Vatan montre qu’il faut faire une différence entre lutte (des classes) opposant les prolétaires aux capitalistes et concurrence entre salariés, concurrence organisée par le capital pour contrecarrer la baisse du taux de profit, dynamique majeur du développement capitaliste,  par la hausse du taux d’exploitation.C’est un point des plus importants dans ce livre,  que la relation clairement exposée  entre la situation faite aux prolétaires et la nécessité d’augmenter toujours plus le taux d’exploitation.  La baisse du taux de profit et la volonté  des capitalistes de la combattre est à la racine des évolution sociales.

Notons au passage que l’auteur montre toute la validité , comme expression de la contradiction fondamentale du développement capitaliste,  des concepts de surproduction/ suraccumulation du capital, concepts malheureusement biens oubliés et pourtant bien féconds.

C’est un point des plus importants dans ce livre, que la relation clairement exposée  entre la situation faite aux prolétaires et la nécessité d’augmenter toujours plus le taux d’exploitation.  La baisse du taux de profit et la volonté  des capitalistes de la combattre est à la racine des évolution sociales

C’est encore démontré en analysant ce que l’auteur appelle les formes détournées de l’exploitation ,hors de la sphère de la production, notamment à travers le système du crédit, qui permet à la classe capitaliste de reprendre une partie des salaires – le capital variable  – versés aux prolétaires.

Tout lecteur un peu assidu du Capital verra à quel point l’auteur a compris et assimilé les schémas de la reproduction élargie du capital de Marx .

Une des conséquences de cette baisse du taux de profit qu’Antoine Vatan tire très justement c’est qu’il ne saurait y avoir de re-industrialisation de la France impérialiste sans élévation du taux d’exploitation. Derrière les discours  de droite, macroniste ou républicain, social-démocrate  ou encore d’extrême droite fasciste, il  ya la menace d’une  nouvelle détérioration des conditions de travail et de vie des prolétaires. Et c’est pourquoi il ne saurait y  avoir de re-industrialisation véritable que socialiste.

C’est un autre mérite du livre que de caractériser par une analyse minutieuse le système économique français comme un impérialisme ce qui est profondément juste.

La distinction que fait l’auteur entre Etat et appareil administratif d’Etat, distinction que nous laisserons le lecteur découvrir est aussi un point d’appui  politique pour les luttes de classe.

Ce livre ,qui nous apprend à débusquer derrière chaque geste de la vie sociale quotidienne l’omniprésente exploitation quel qu’en soit la forme, tant pour la compréhension de la société française que pour le matérialisme historique à l’œuvre, fera date.


 

mardi 26 mars 2024

Notes sur "Charbons ardents" de Jean-Michel Carré, 1999


 Les victoires prolétaires sont rares au cinéma et globalement dans les médias. C'est l'imaginaire de la victime qui prévaut plus que celui de guerrières ou guerriers épiques (à la manière de Bertolt Brecht par exemple). Ainsi, il est presque impossible de trouver un film mettant en scène la grève et encore moins une qui réussit, "qui paye" à la fin. Dans les films politiques italiens des années 1970, le grand public peut voir ce type de scènes alors qu'en France cette possibilité se cantonne au cinéma documentaire et militant (du genre Cinélutte). 

Je ne pensais pas retrouver une victoire prolétaire dans un film (documentaire) des années 1990 et d'autant plus dans la Grande-Bretagne façonnée par Margaret Thatcher: elle avait détruit les mobilisations des mineurs dans les années 1980. Comme le dit un mineur dans Charbons ardents les mines ne furent pas fermées parce qu'elles n'étaient pas rentables mais pour en finir avec les mineurs: c'est-à-dire les mieux payés et organisés des prolétaires, ceux qui tiennent haut la bannière rouge.  

L'accent du Pays de Galles je l'avais presque oublié depuis que j'y étais allé dans années 1980 justement, je n'y comprenais rien alors et c'est toujours aussi particulier, loin de la langue anglaise ampoulée-chic ou étriquée-globish, et la marque culturelle d'un Nous prolétarien puissant comme on le voit dans la vie sociale totalement imbriquée au travail des mineurs.

Dans Charbons ardents la victoire ne consiste pas en une simple amélioration des conditions salariales mais commence à ressembler à du socialisme. Le film est réalisé par Jean-Michel Carré (trotskyste?), il est difficilement trouvable (l'acheter?) mais permet de sortir du fatalisme que la lutte ne paie pas ou ne paie plus.

Après on voit bien que cette seule action ou victoire n'était pas en mesure de faire dévier le Labour party, le New Labour de Tony Blair, dans sa stratégie libéral-impérialiste et notamment en détruisant l'Irak. Ce fut une même logique d'asservissement opérant évidemment "inside" et "outside" et elle est passée par l'anéantissement culturel. 

Dans le film de Carré, on voit bien la place de la culture ouvrière comme ferment du Nous prolétarien, son danger donc, et de même on pense à l'Irak non seulement pour les massacres perpétrés comme les 500.000 gosses morts de famine et pour la "bonne cause" selon Madeleine Albright, mais pour la destruction du patrimoine du berceau des civilisations (le 9 avril 2003, Bagdad tombait. Robert Fisk, le légendaire correspondant au Proche-Orient du quotidien londonien The Independent, écrivait sur les jours suivants: "Si le 9 avril fut le 'Jour de la Libération', le 10 avril fut le 'Jour du Pillage'. Une semaine après plus de 170.000 objets d'origine sumérienne, acadienne, assyrienne et babylonienne avaient déjà disparu du Musée national de Bagdad". Après 40 jours de pillage, il conclut: "Bagdad, année zéro").

"En avril 1994, épuisés par une lutte acharnée contre le gouvernement conservateur de Margareth Thatcher, les mineurs de "Tower Colliery", propriété nationale de la British Coal (au pays de Galles), votent la fermeture de leur mine comme beaucoup d'autres. Mais leurs dirigeants syndicaux refusent d'accepter cette défaite et réussissent à convaincre les mineurs de racheter "leur mine" en réinvestissant leurs indemnités de licenciement.

 Depuis maintenant quatre ans, ces travailleurs sont actionnaires, employés et dirigeants de leur entreprise organisée en coopérative. Résultat : la mine n'a jamais été aussi rentable, l'absentéisme aussi faible et la sécurité si importante.

En tentant de réaliser leur rêve de socialisme et de démocratie, ces patrons d'un autre genre sont confrontés à des contradictions politiques et surtout idéologiques. Une telle réussite peut-elle rester compatible avec leur idéal?

Ce film, plein d'espoir, retrace cette aventure exemplaire, menée par des hommes et des femmes ordinaires."