mercredi 25 septembre 2024

"Au Service de l'Esprit" (Paul Vaillant-Couturier, 1936)

 Le texte Au service de l’esprit. Pour la convocation des Etats Généraux de l’Intelligence Française, fut présenté par Paul Vaillant-Couturier devant le comité central du Parti Communiste Français en octobre 1936.

Au Service De L’esprit Paul Vaillant Couturier 1936

 "Tout le problème est là: mettre la machine au service de l'homme. Il s'agit de transformer le chômage en loisir."


***

Rapport présenté au Comité Central du Parti communiste Français le 16 octobre 1936 et approuvé à l’unanimité.

Un désordre sans précédent préside au destin des choses et des hommes.

Le monde vit dans la hantise de la guerre, dans la crainte ou sous la chappe de plomb de la servitude, dans l’effroi – au milieu de l’abondance – de manquer du pain quotidien.

La jeunesse, ouverte sur la vie, est courbée sous la terreur du lendemain ; les anciens combattants continuent leurs sacrifices ; la vieillesse ne connaît plus ni calme assuré, ni repos...

Personne n’échappe à la loi commune de l’insécurité.

Et les questions qui angoissent les hommes, qui troublent leurs nuits, qui gâtent leur vie, prennent de plus en plus d’acuité dans les milieux de l’intelligence.

Savants, éducateurs, professeurs, techniciens, médecins, artistes, écrivains, sont assiégés, pressés de toutes parts, bousculés par la rafale des questions et des problèmes que le rythme de la vie moderne leur impose à une cadence de mitrailleuse.

Ils étudient, ils cherchent, ils découvrent, ils retrouvent, ils perdent, ils résolvent, ils interrogent, ils se débattent, cherchant à sauvegarder l’esprit dans un monde asservi à la tyrannie du matérialisme de l’argent.

Le Parti communiste les écoute. Il les entend. Il comprend leurs inquiétudes, il les recueille. C’est plus que son devoir. C’est l’une de ses raisons d’être.

Les inquiétudes des intellectuels rejoignent ses préoccupations, elles les éclairent, elles les complètent.

Et nous pensons – nous qui savons à quel point les idées jouent un rôle considérable dans le déroulement de l’histoire – que les intellectuels, qui sont en quelque sorte les idées incarnées, peuvent, dans les heures que nous vivons, tenir aux côtés des masses une place capitale dans l’indispensable remise en ordre du monde.

Qu’il s’agisse de la défense de la paix, de la défense de la liberté ou de la défense du pain, c’est avec eux que nous voulons chercher la solution des problèmes qui angoissent les hommes.

I- L’INTELLIGENCE ET LA PAIX

Dans la conscience de chaque intellectuel se pose au premier plan la grande question de la Paix.

L’intelligence défend la paix. L’intelligence a horreur de la guerre, parce qu’elle est la destruction des valeurs, en même temps que des choses, et que les intellectuels sont au cœur des valeurs spirituelles.

Chez les communistes aussi, la préoccupation de sauvegarder la paix domine tout.

Ils ressentent moralement et presque physiquement, eux, les interprètes des grandes masses qui font les batailles, l’inquiétude humaine devant la guerre.

Et leur attachement à l’esprit créateur, leur révolte raisonnée contre les forces de l’argent, les relient étroitement aux préoccupations des intellectuels.
Le Parti communiste est le grand Parti, le Parti par excellence de la Paix.

Il est né de la guerre et de la révolte des hommes contre la guerre et contre la haine... Il a été forgé de 1917 à 1920, par la volonté des multitudes de la génération du feu, par la colère des survivants. Son action contre la guerre lui a valu des persécutions incessantes. Sa volonté de rapprochement avec le peuple allemand a coûté des centaines d’années de prison à ses militants. Ayant le sentiment profond de sa mission d’unité humaine, il peut hardiment prétendre que tout ce qui est pacifique est sien.

Les hommes qui, comme moi, ont participé à la campagne de 1914 à 1918, ceux qui, comme moi, ont assisté aux épisodes de l’affreuse guerre civile qui désole d’Espagne, détestent le sang. Ils sont attachés au respect de la vie humaine, passionnément.

J’entends bien que certains, dans leur horreur de la guerre, évoquant ce que serait une guerre moderne, qui ne connaîtrait pas d’avant, ni d’arrière, avec son cortège de bombardement à gaz, de tueries de vieillards, de massacres de femmes et d’hécatombes de berceaux, se résignent à dire : « Tout ! Oui, tout ! même la servitude, plutôt que la mort ! »

Je comprends leur pensée. Nous avons connu, nous, les combattants écœurés de meurtres, cet état d’esprit tragique. Nous savons que ces idéalistes que sont les intellectuels ne reculent pas devant le danger. Nous savons qu’il ne s’agit pas chez eux de la vile peur de la mort. Nous savons qu’instruits par le passé, ils veulent seulement éviter au monde et à leur pays un nouveau bain de sang et des sacrifices vains. « On croit mourir pour la Patrie, disait Anatole France, on meurt pour les industriels. »

Et devant cette vanité des sacrifices, ils ne songent qu’à sauvegarder le bien le plus précieux des hommes, la vie... Ils espèrent de leurs deux mains réunies, en protéger la flamme vacillante, au milieu des pires tempêtes. Malheureusement, l’expérience de l’histoire nous enseigne qu’on en arrive parfois à perdre, non seulement les raisons de vivre, mais la vie elle-même, en voulant, par certains moyens, la sauvegarder.

La servitude conduit à la mort.

Dans notre défense enthousiaste de tout ce qui est vivant, nous ne pouvons accepter cet attentat contre la vie et les valeurs qui font la vie, qu’est la servitude. La guerre a besoin de la servitude.

La servitude moderne du fascisme fait des peuples d’immenses troupeaux marchant sous le signe de la mort. Mort morale, mort intellectuelle, mort physique. Nous ne voulons pas laisser conduire les peuples à l’abattoir de la servitude.

CONTRE LA SERVITUDE

C’est ce qu’avaient compris, dans le passé, de grands esprits de notre pays qui, contre la tyrannie, n’hésitèrent pas à se porter au secours de la liberté menacée.

Lorsque en 1822, le Congrès de Vérone chargea la France d’aller restaurer la Monarchie espagnole et d’écraser les libéraux constitutionnels, le grand publiciste Armand Carrel, à cette époque officier, donna sa démission pour aller rejoindre la légion qui défendait en Espagne, contre le corps expéditionnaire du duc d’Angoulême, la cause de la liberté.

Lorsqu’en 1830, le peuple polonais était aux prises avec la tyrannie du tsar et que la Prusse fournissait en armes la Russie, toute l’élite intellectuelle de notre pays s’est rangée aux côtés de la Pologne et a réclamé l’aide du peuple français.

Avec Lamartine et Daumier ce furent les grands journaux démocrates : le « National », la « Tribune », le « Charivari », la « Caricature » qui menèrent la lutte contre Louis-Philippe et Casimir Périer qui se faisaient les défenseurs de l’autocratisme. C’était l’époque où un M. Dupin, répliquant aux préoccupations généreuses de Lamartine, s’écriait : « Non ! Chacun chez soi, chacun pour soi ! » et où Louis-Philippe écrivait dans une lettre : « C’est nous, bien plus que les vainqueurs de Varsovie, que le cabinet de Saint-Pétersbourg doit remercier d’avoir écrasé la Pologne. »

Si Louis-Philippe et les esprits sans envergure qui l’entouraient furent satisfaits, l’indignation dut immense en France, après la défaite du peuple polonais.

« La prise de Varsovie, écrit Seignobes, fut l’occasion d’un deuil national. »

« A Paris, les affaires furent suspendues, les `théâtres fermés et l’opinion publique ressentit comme une insulte, la déclaration du ministre français des Affaires étrangères : L’ordre règne dans Varsovie. »

Lorsque, en 1849, les patriotes romains se soulevèrent contre la domination du Pape et proclamèrent la République, ce fut l’historien Edgar Quinet qui dénonça la politique d’intervention du prince président Louis Napoléon et annonça prophétiquement : « La défaite de la République romaine entraînerait la mort de la République française. »

On sait comment, deux ans plus tard, le 2 décembre, sa prophétie devait se réaliser.

De même, la Hongrie et la Grèce virent se rassembler autour d’elles, pour leur indépendance, les meilleurs esprits de l’Intelligence française du temps.

C’est ainsi que la France devint l’espoir et la lumière des peuples en lutte pour la liberté, parce qu’elle n’a jamais pu se résigner, ni pour elle ni pour les autres, à la servitude.

ON PEUT EVITER LA GUERRE

Cependant, s’il est dangereux de se résigner à la servitude, il ne faut jamais se résigner à la perspective de l’inévitabilité de la guerre. Ceux qui croient la guerre inévitable portent fatalement la guerre en eux.

Notre parti veut la Paix et il est prêt à tous les sacrifices pour la conserver. Mais nous demandons à ceux qui ne veulent pas de sacrifices vains pour la guerre, qu’ils ne consentent pas à des sacrifices vains pour la Paix.

Nous avons tout fait pour que le désarmement général et simultané – car tout désarmement unilatéral serait une duperie – devint une réalité. Les puissances enchaînées aux trusts l’ont écarté avec dédain. Nous avons réclamé la limitation des armements. Elle a été repoussée. Nous n’abandonnons pas, nous n’abandonnerons jamais la partie. On nous trouvera toujours prêts à la reprendre, Nous savons que le désarmement est le vœu le plus cher des peuples qui trébuchent ou succombent sous le fardeau des armes. Nous souffrons de cet incroyable gaspillage d’énergies et de richesses.

Nous avons tout fait pour que l’entente des peuples devînt une réalité. Et nous ferons tout pour y parvenir, nous, le Parti de la Paix et de l’unité humaine. Rien ne nous rebutera. Nous restons toujours prêts à discuter avec tout le monde, avec tout ceux qui s’affirmeront prêts à respecter leur signature, dans le cadre des accords internationaux et de la Société des Nations. Peu nous importe – et nous croyons que c’est là aussi le sentiment de l’intelligence française – quand il s’agit de sauver la paix, les régimes intérieurs des nations auxquelles nous nous adressons !

Nous ignorons pour notre part, ce qu’est un « ennemi héréditaire ». Nous n’avons de haine pour aucune nation, pour aucune race de la grande famille humaine. Nos bras sont largement ouverts à tous nos frères et ce n’est pas de notre côté que pourrait germer la monstrueuse idée d’une «  croisade » dont les peuples innocents paieraient les frais.

Mais nous dénonçons un risque redoutable pour la Paix.

LES TROUBLE-PAIX

Qu’on prenne bien garde que l’amour de la Paix, qui est la caractéristique de notre peuple et qui est si puissant dans les milieux intellectuels français, ne soit exploité par les trouble-paix pour nous conduire à la guerre... On ne calme pas les assoiffés de meurtre en reculant sans cesse devant eux. On augmente leur audace.

Sûrs de l’impunité que la réussite de leur bluff leur confère, ils profitent de la mollesse qu’on met à appliquer la loi internationale à l’agresseur pour bafouer le droit des gens. En agitant le spectre de la guerre quand ils sont encore incapables de la faire, ils gagnent du temps pour la préparer. Ils acquièrent ainsi une idée – heureusement fausse – de la faiblesse de leurs voisins. D’étape en étape et de chantage en chantage, ils organisent l’encerclement des nations qu’ils méditent d’anéantir, en même temps que, par la corruption, ils s’y assurent des complicités et des bases.

Pouvons-nous douter, par exemple, des intentions du chancelier Hitler quand nous savons que « Mein Kampf » est constamment réédité dans son édition intégrale, tiré à plus de deux millions d’exemplaires, distribué à profusion en Allemagne et que ce livre constitue un appel permanent à l’anéantissement de la France ?

On y lit, à la page 699, de l’édition allemande de 1935, que « l’ennemi
mortel et impitoyable du peuple allemand est et reste la France, quel que soit son gouvernement, royaliste ou jacobin, bonapartiste ou démocrate, clérical ou bolchevik
 ».

Et toute la politique internationale de ces derniers mois ne s’inscrit-elle pas en lettres de feu dans ce mot d’ordre inséré à la page 765 : « Une deuxième guerre viendra. Il faut auparavant isoler si bien la France, que cette seconde guerre ne soit plus une lutte de l’Allemagne contre le monde entier, mais une défense de l’Allemagne contre la France qui trouble le monde et la paix. »

L’injustice, la haine, la cruauté froide contenues dans ces textes remettent
à leur place toutes les déclarations de Nuremberg sur la Russie et le bolchévisme. Elles expliquent les interventions continuelles du IIIe Reich, ses coups de forces successifs, la violation de ses engagements, ses ingérences dans la politique française et l’aide qu’il n’a jamais cessé d’apporter aux rebelles d’Espagne.

C’est l’organisation internationale de la haine.

Eh bien, même cela ne nous rebute pas dans notre volonté de paix. Toujours, la France de Diderot souhaitera l’amitié de l’Allemagne de Goethe. Nous conservons pour le peuple allemand, pour la liberté de l’indépendance de qui nous avons payé de notre personne et de notre liberté, toute notre affection. Mais nous disons, avec la Ligue des Droits de l’Homme : « Prenez garde ! Les capitulations n’assurent par la paix. En laissant le champ libre aux violents, elles conduisent droit à la guerre. »

PAS DE CROISADE

Que veulent donc les communistes ?

Nous voulons seulement, mais nous voulons fermement l’indépendance de notre pays. L’indépendance de la France, nous la considérons comme l’un des moyens de la paix. Nous voulons que les Français soient maîtres et seuls maîtres chez eux.

Nous ne voulons pas que notre pays soit à la remorque de quelque gouvernement que ce soit. Ni de Londres. Ni de Rome. Ni de Berlin. Ni de Moscou.

La France est une grande nation prête à donner son amitié à tous les peuples de bonne volonté, mais elle n’accepte la servitude ni dans le domaine de la politique, ni dans le domaine de l’argent, ni dans le domaine de l’esprit.

Les menaces du fascisme hitlérien ont amené en France ce que Delmas, secrétaire du Syndicat des instituteurs, dans un récent article, appelait un « renversement des positions traditionnelles ».

Les travailleurs français, avec leurs drapeaux rouges, serrent maintenant les rangs autour du drapeau tricolore, tandis que ceux qui s’intitulent les nationaux se rallient autour de la croix gammée, insigne du fascisme international...

Est-ce à dire que pour sauvegarder la liberté de la France, nous soyons prêts à la constitution d’un bloc des démocraties pour l’opposer au bloc des fascismes ?

Ce serait une dangereuse illusion de croire qu’on pourrait protéger durablement la paix par cet équilibre hérissé des principes antagonistes et de baïonnettes affrontées.
Et nous comprendrions parfaitement la répugnance qu’éprouveraient à se laisser entraîner dans une telle aventure, les intellectuels instruits des leçons de l’histoire. Mais tel n’est pas, tel ne peut pas être notre but. Des amitiés, oui. Une coalition, non.

Notre respect du droit international écarte – à l’inverse du fascisme, interventionniste pas essence – l’idée de l’intervention. A l’image des jacobins nous nous défions des missionnaires armés.

Nous voulons simplement le respect du droit international. Nous voulons unir les forces de paix dans la dignité de la nation, pour offrir, avec plus de force encore et plus de retentissement, la paix au monde. Nous voulons une France forte parce que nous voulons la Paix.

Pour nous, la France est symbolisée par le paysan qui aime sa terre, cette terre sur laquelle les siens, de générations en générations, ont épuisé leurs forces, ont donné le meilleur de leur intelligence, de leurs bras et de leurs soins, le paysan qui a porté sur ses épaules les longs sacrifices de toutes les guerres et qui les a payées après les avoir faites, qui ne convoite par la terre d’autrui, mais qui ne veut, à aucun prix, qu’on vienne lui voler son bien. Il est toujours prêt à s’unir à ceux qui veulent le protéger.

CONTRE LES DIVISEURS

C’est l’union intérieure qui sauvegarde la paix extérieure.

Nous voulons unir pour la paix, ceux que l’on cherche, des chefs factieux aux chefs trotzkystes, à diviser.

Quel intellectuel français pourrait se refuser à voir le péril que fait courir à la
paix la vague de division et d’attentats individuels déchaînée par le fascisme et le trotzkysme sur le monde : assassinat de Barthou, assassinat du Roi Alexandre, assassinat de Kirov ?

Le procès de Moscou a apporté la preuve, de la bouche même des accusés trotzkystes, de cette politique d’aventures poursuivie en collaboration avec la Gestapo, et qui est aussi loin du communisme, que l’est du travail d’un honnête ouvrier, l’activité sanglante d’un vulgaire assassin.

Où nous voulons unir, eux, les contre-révolutionnaires trotzkystes divisent ; où nous défendons la démocratie, ils s’en montrent les ennemis irréductibles ; où nous cherchons à rassembler la nation française, ils en nient jusqu’à la réalité vivante ; où nous affirmons notre fraternité à l’égard des grandes organisations politiques et syndicales voisines, ils sapent l’autorité des partis et des syndicats.

Le débat n’est pas entre les communistes et les trotzkystes, il est entre les trotzkystes et la totalité des amis de la Paix et de la moralité mondiale.

Les aventuriers trotzkystes, spécialistes du terrorisme international et de la provocation, constituent un danger permanent pour la paix et aucune des légendes dont une connaissance insuffisante de leur activité passée et présente, les entoure aux yeux de certains, ne peut cacher leur caractère de fléau international.

On peut pardonner à la passion criminelle. On ne peut pas pardonner au crime conscient.

Quant à nous, Parti communiste, adversaires déclarés des attentats
individuels et partisans de l’union de la nation française contre la ploutocratie, nous ne cesserons pas un jour d’offrir le pacte de paix au peuple allemand, quelle que soit la mauvaise volonté ou les rebuffades de son Führer, jusqu’à ce que le pacte devienne une réalité.

Rien ne peut séparer ceux qui veulent profondément et passionnément la paix.

« La Paix, disait Aristide Briand, est une maîtresse exigeante. »

Elle veut, pour être défendue, qu’on lui consacre le meilleur de son activité et
de sa vie.

Qui, mieux qu’un homme formé par la culture française, peut ressentir cette obligation impérieuse ?

On a trop souvent et trop longtemps défiguré la France à l’étranger en la montrant turbulente, chauvine, légère et corrompue.

Les Français eux-mêmes se sont trop souvent et trop longtemps plus à se dénigrer.

Or, la France n’est pas cette caricature.

L’ardeur généreuse n’est pas la turbulence, le sentiment des valeurs et des traditions nationales n’est pas le chauvinisme, l’élégance n’est pas la légèreté et la corruption de quelques-uns - qui sont les mêmes dans tous les pays capitalistes et pour les mêmes raisons - n’est pas le fait du peuple français.

C’est la générosité française, c’est l’amour français de l’indépendance, c’est ce sens français de l’universel, c’est l’humanisme français qui demeurent les meilleurs garants de la volonté française de paix.

La Paix porte en soi l’attrait et le prestige du plus haut idéal de l’homme.

Si l’on fait pour elle des sacrifices, elle veut qu’ils soient utiles.

A défaut du désarmement sans cesse écarté, elle nous offre pour sa sauvegarde immédiate, la sécurité collective. La paix ne se bèle pas !

Unissons nos efforts et que l’intelligence française au premier rang – dans une union française qui n’est pas l’ « union sacrée » - lance inlassablement l’appel à la fraternité à ceux qui n’ont pas encore voulu l’entendre, à ceux qui se sont refusés à donner des gages de leur sincérité.

II- L’INTELLIGENCE ET LA LIBERTE

La paix ne se conçoit pas sans la liberté. Nous voulons une France libre. Les tyrannies engendrent la guerre. La servitude sert la mort. La liberté protège l’homme. Elle est la condition même de sa pleine réalisation. Elle est la cause du progrès et de la création dans tous les domaines.

L’homme ne peut penser et créer que s’il est libre.

Le drame historique de l’homme, c’est son combat contre les forces d’esclavage. La civilisation, c’est l’œuvre de la lutte pour la liberté. C’est à ce titre que nous considérons l’intelligence comme le combattant de la liberté.

Les intellectuels entraînent les masses, les galvanisent, décuplent leur force explosive par la puissance de l’esprit. Ils tirent les peuples de l’ornière et projettent la lumière dans les ténèbres.

Les communistes à leurs côtés sont les missionnaires historiques de la liberté.

C’est pourquoi les ennemis de la liberté cherchent à défigurer le Parti communiste français.

Une calomnie intéressée veut faire de nous des égalitaristes, niant la personnalité humaine, flattant les instincts grégaires et opprimant l’individu.

Les communistes, tout au contraire, cherchent à créer les conditions sociales nécessaires et indispensables au développement de l’individu.

Il y aura toujours des inégalités physiques ou intellectuelles. Ce sont les injustices des inégalités sociales que nous voulons abolir.

DEFENSE DE L’INDIVIDU

Le capitalisme moderne est la négation de l’individu. Il organise un implacable nivellement par la base. Il broie l’individu, il l’humilie en l’encadrant dans une organisation de termitière où la cadence exigée par le profit ne laisse plus à l’être le temps de penser, où il fait de lui un appendice de chair dans une machinerie d’acier.

C’est pourquoi si nous avons toujours admis la légitimité de la propriété, fruit du travail et de l’épargne, nous restons les irréductibles adversaires de l’exploitation de l’homme par l’homme.

Dans le monde capitaliste des monopoles privés, la personne humaine, cette grande force spirituelle, est traquée, régie et dégradée par la force honteuse de l’or.

L’or, aveugle et brutal, tue la lumière de l’esprit.

Qui, plus que l’intelligence, souffre de cette humiliation de la personne humaine ?

Qui, mieux qu’elle, peut avoir le sentiment des forces gaspillées, des valeurs perdues, de la vieillesse condamnée, du malheur d’être jeune, de la tristesse du poète sans audience, de la honte de l’artiste objet de luxe, du désespoir de l’inventeur sans laboratoire, de la misère intellectuelle de l’ingénieur déclassé ?

Les communistes, eux, proclament l’individu ! Ils l’accouchent de la société. Ils le délivrent.

Le communisme est la doctrine de son émancipation réelle.

Et le communisme ne se contente pas d’attendre la construction d’une société nouvelle, pour aider l’individu à se réaliser.

C’est dès aujourd’hui qu’il agit pour lui.

Il l’appelle à se réaliser, en luttant pour ses grands idéaux, en le conviant au désintéressement et à la création ardente.

DEFENSES DES VALEURS MORALES

Les communistes savent reconnaître les valeurs partout où elles se trouvent. Ils ne polémiquent pas avec l’histoire. Ils admirent l’esprit créateur d’où qu’il souffle, chez Vauban comme chez Balzac, chez Carnot comme chez Pasteur, chez Robespierre comme chez Napoléon.

Lorsque l’aviation française perd l’un de ses pionniers, en Blériot, ou lorsque la science française perd l’un des conquérants des Pôles en Charcot, notre Parti ne cherche pas si l’un était un patron de combat et si l’autre était un réactionnaire déterminé, il salue en eux, dans une délibération publique de son bureau politique, deux grands créateurs de valeurs humaines.

C’est l’une de nos façons de lutter contre ce qui nous est le plus étranger au monde, le sectarisme, qui rétrécit les perspectives de l’homme et rend sans cesse plus étriquée la personnalité.

Nous luttons pour la dignité de l’individu en combattant le matérialisme vulgaire engendré par le capitalisme, en allant débusquer de son repaire, cette « pièce de cent sous tapie », comme le disait Balzac, « au fond des consciences ».

Le capitalisme entend faire du ventre, le principal organe de l’humanité, et transformer l’esprit en une marchandise.

Sous son règne, toutes les valeurs immatérielles sont devenues des marchandises.

Le prêtre, le savant, le juge, le soldat ont perdu ce qui faisait leur force morale.

La conscience s’est cotée. Elle a sa bourse noire. La valeur de l’esprit suit la fluctuation des monnaies et le cours des changes.

Il y a une inflation et une dévaluation de l’intelligence.

Le capitalisme avilit la morale. Il s’attaque aux valeurs les plus sacrées comme un acide. Il dissout la moralité !

Le capitalisme détruit la famille, il la disperse, il la sabote.

C’est lui qui organise la terrible dénatalité de la France par l’hypocrisie sociale, la ruine des valeurs morales, le triomphe de l’égoïsme, le chômage et la tyrannie du profit.

Parce que nous combattons l’obscurantisme qu’il développe et l’absurdité économique qu’il provoque dans son agonie, parce que nous en appelons à la raison et à la science, le capitalisme se venge en nous dépeignant comme des matérialistes à sa manière, préoccupés uniquement de satisfaire des instincts.

OU SONT LES IDEALISTES ?

Où sont-ils, pourtant, les véritables idéalistes ?

Est-ce dans les rangs de ceux qui servent l’or, où dans les rangs de ceux qui le méprisent ? Est-ce dans les rangs de ceux qui s’arrêtent à la satisfaction des besoins ou dans les rangs de ceux qui veulent étendre le sens du héros en célébrant le héros-savant, le héros-mécanicien, le héros-ingénieur, le héros-paysan, le héros-poète, l’héroïne-mère ?

Est-ce dans les rangs de ceux qui acceptent l’humiliation d’encenser la ploutocratie ou dans les rangs de ceux qui, repoussant les privilèges que la haute bourgeoisie corrompue et corruptrice aurait été trop heureuse de leur offrir, suivent une vie médiocre, mais rectiligne, faite de sacrifices et de risques multiples, mais toute illuminée par la satisfaction de servir leur idéal.

Notre Parti, par le dévouement joyeux et l’intégrité inattaquable de ses militants, par son indépendance financière absolue, donne l’exemple de la propreté et de l’idéalisme.

L’attachement des communistes aux valeurs morales et spirituelles, leur intelligence des situations et de la complexité des problèmes, la simplicité de leur vie, la façon dont ils savent souffrir, perdre leur liberté et au besoin mourir pour la foi qu’ils ont en l’homme, c’est tout cela qui contribue à faire du communisme, un moment de la France éternelle et un moment du monde.

Attachés à la conquête par l’individu de la plénitude de sa dignité, les communistes s’inclinent devant tous ceux, quels qu’ils soient, qui cultivent leur conscience.

Il est naturel que nous respections la conscience de chacun, nous qui voulons que l’individu prenne toujours davantage conscience de soi-même.

La liberté de conscience est pour nous l’une des formes les plus sacrées de la liberté.

Profondément attachés à toutes les formes de la liberté, non seulement les communistes marquent leur souci constant de l’individu et donnent l’exemple de l’idéalisme, mais ils se proposent la construction d’un monde où la culture aura la place dominante.

Ils proclament et ils prouvent leur attachement aux traditions culturelles de la France.

Ils se félicitent de la place qu’elles occupent dans le monde. Les Français ont été et doivent continuer d’être de grands faiseurs de culture.

Les communistes veulent aller toujours plus loin dans l’union du travail et de l’art. Ils se sentent très près des bâtisseurs des cathédrales.

Ils appellent à l’union de la science et du travail. Ils se sentent déterminés par la longue et magnifique lignée de la science et de la philosophie françaises : Descartes, Pascal, les Encyclopédistes d’Alembert, Diderot. Et, dans la science moderne, ils réunissent dans la même vénération dégagée de toute
préoccupation politique, les Perrin, les Joliot-Curie et les Branly.

Le Parti communiste s’associe à l’éducation du peuple. Il ne se contente pas d’enseigner, dans ses écoles, sa doctrine. Il va plus loin. Il accorde tout son appui aux initiatives indépendantes prises par les Maisons de la Culture qui couvrent la France d’un réseau de plus en plus serré et réunissent déjà des dizaines de milliers de membres ou d’affiliés. Mais il se garde bien d’introduire, dans les Maisons de la Culture, des restrictions politiques. Il n’y réclame pour les siens que leur part dans l’union et la collaboration de toutes les tendances de l’esprit.

Nous savons bien que l’union, que la fusion totale du travail de la culture ne se fera que dans une société rénovée, débarrassée non seulement de la lutte des classes, mais de la notion même de classe. Cependant, dès à présent, nous travaillons avec acharnement pour développer, parmi les masses, la culture et pour défendre l’intelligence menacée.

LE FASCISME CONTRE LA CULTURE

Ce n’est un secret pour personne, que le fascisme ennemi de liberté est, par définition, une force qui brise le ressort de toute création humaine et qui avilit les valeurs spirituelles, par la restriction systématique de la culture.

Au service du capitalisme, le fascisme, escroc de la jeunesse, sacrifie tout à la défense d’un système économique condamné. C’est sa raison d’être.

Sous un aspect publicitaire de spiritualité hypocrite, il est le triomphe du matérialisme le plus bas. C’est pourquoi les oligarchies subventionnent son action.

« Périssent les valeurs spirituelles pourvu que subsiste le capitalisme ! » est en réalité sa devise.

Cherchant à consolider l’absurde, il est le négateur de la raison.

Le fascisme a peur de la raison.

Or, la France a toujours été la terre élue de la raison, la grande civilisée qui a combattu pour le nationalisme. La lutte contre l’obscurantisme s’illustre en France, avant Diderot, des grands noms de Rabelais, de Montaigne et de Descartes.

De Descartes, certains n’ont voulu retenir que le côté métaphysique. Ils l’ont ainsi défiguré. Descartes, c’est avant toutes choses, le champion du libre examen, du droit de chacun à la réflexion, le grand porte-parole de la raison.

Le fascisme, lui, veut priver le monde de la raison en privant le monde de la culture.

Les exemples abondent.

Prenons l’Italie.

Constatons, d’après le « Bulletin de statistique de 1934, sur la répartition des étudiants d’après la profession du chef de famille », que, pour l’université de Padoue, par exemple, l’instruction se concentre entre les mains des classes riches ou aisées : restriction de la culture.

Sur 2.928 étudiants, tandis que les fils d’industriels et d’entrepreneurs représentent 24 %, les fils de propriétaires 25,4 %, les fils de pères exerçant des professions libérales 24,8 %, les fils d’employés ou de fonctionnaires (fascistes pourtant) ne représentent que 22 % et les fils d’ouvriers 2,7 %.

Cette élimination de la masse remédie-t-elle à l’encombrement des carrières intellectuelles. Pas du tout.

Le journal « Cantière » de Rome du 29 décembre 1935 dit, que pour un concours ayant eu lieu à Rome, en vue de pourvoir à 60 poste d’agents de police, au traitement de 500 lires par mois, sur les 3.000 concurrents qui s’étaient présentés, il y en avait plus de 1.000 pourvus de baccalauréats ou de doctorats.

« Nous allons, s’écriait M. Mussolini, le 26 mai 1934, vers une période d’une humanité nivelée à un standard plus bas. »

« Je conçois la nation italienne, a-t-il proclamé, comme en perpétuel état de guerre. »

En Allemagne, c’est encore plus lourd.

Pour les bacheliers, le camp de travail est devenu un service obligatoire de six mois. Le but poursuivi est de les inciter à abandonner leur idée primitive de poursuivre leurs études supérieures.

Le cours de pédagogie politique de l’Université de Berlin l’avoue qui commence par ces lignes :

« Nous pouvons résumer la signification du national socialisme dans le domaine spirituel en un mot : le remplacement du type de l’intellectuel par le type du soldat. »

Le résultat est tangible.

Le nombre des étudiants admis en première année dans les universités allemandes, qui avait été en 1931 de 30.800, a été en 1934 de 10.000.

Le nombre total des étudiants qui était pour l’ensemble des universités allemandes de 129.600 en 1932, n’est que de 95.667 en 1934 pour le même semestre. Et malgré cette diminution, le chômage intellectuel sévit toujours.

Comme pour rendre plus éclatante sa doctrine, l’hitlérisme l’illustre et l’éclaire à la lumière des bûchers pour lesquels sont brûlés des milliers de livres !

Et les rebelles espagnols l’imitent !

En brûlant les livres, c’est-à-dire le signe des valeurs culturelles, les fascistes prétendent désintoxiquer la nation !

A dire vrai, ils ne cherchent qu’à détruire la raison et la réflexion pour que l’individu encaserné dans les usines ou embauché dans les milices et les phalanges, vive dans l’esclavage sans pouvoir se rendre compte de la gravité de sa déchéance.

Les fascismes haïssent la raison, parce que la raison est la lumière intérieure de la personne humaine, sa commune mesure avec les autres hommes et le grand ferment de la liberté.

Le fascisme aggrave l’obscurantisme et alourdit l’asservissement de l’homme à la machine. La termitière capitaliste, où la fourmi humaine apercevait encore parfois une lueur capable de la conduire à l’évasion, devient une obscure machinerie broyeuse, un enfer sans rémission, une Métropolis sans lumière.

Le fascisme avilit l’art qu’il met au service exclusif d’une politique. Les conséquences sont désastreuses. La qualité baisse. Le schématisme s’empare de l’art qui devient un simple instrument de propagande, c’est-à-dire, un art desséché, officiel, menteur.

Les communistes, eux, détachent l’art de l’étroitesse politique. Ils libèrent ses ailes des liens du capitalisme. Ils lui donnent, à ses risques et périls – c’est-à-dire, en toute indépendance – pour public, un peuple entier.

Ils repoussent la pièce à thèse, le roman à thèse, la thématique obligatoire. Ils ne demandent à l’art que d’être libre, d’être sincère et d’être humain.

Contre l’art pourri, pornographique, malsain, déraisonnable, inspiré par la décadence des mœurs bourgeoises, les communistes appellent le retour à l’art sain dans la liberté.

Le fascisme avilit la science en l’appelant à n’être plus qu’une
section de l’industrie de guerre. Et, pour ses fins, il lui demande de mentir à ses destins de raison et de vérité.

AU SERVICE DE LA VERITE

Le fascisme est l’ennemi de la vérité. Pour les besoins de sa cause, systématiquement, il l’étouffe.

La France, elle, est le pays des défenseurs de la vérité.

De Voltaire avec l’affaire Calas, à Zola avec l’affaire Dreyfus, elle s’est toujours rassemblée derrière ses plus grands esprits pour défendre la vérité outragée.

Quant au communisme, doctrine scientifique, il est la recherche permanente de la vérité. Il sait que le mensonge est toujours l’arme des propagateurs de l’obscurantisme et des ennemis de la liberté.

Tandis que les fascistes tendent à consolider ce qui est mort, ce qui croule et ce qui, du passé, empeste déjà, les communistes, au contraire, sont les hommes des valeurs vivantes, les hommes de l’avenir des masses et de l’avenir de l’esprit.

L’avenir de l’esprit passe par le chemin des grandes masses humaines... Les masses sont devenues majeures. Elles jaillissent, concentrées par lui, du capitalisme. C’est d’elles déjà que sort, impérieux, en même temps que des milieux de l’intelligence, l’appel à l’esprit.

Il est temps de donner le pas à l’esprit sur les forces de la matière.

« Le socialisme, a dit Engels, c’est la soumission des forces économiques aveugles à la raison. »

C’est le passage du règne de la nécessité au règne de la liberté.

Mais pour que la liberté règne, il faut que l’homme qui n’est aujourd’hui qu’un instrument, qu’un moyen, devienne une fin.

NOTRE HUMANISME

Au-dessus de tout, les communistes placent l’homme.
Et ici, encore, par cet humanisme, ils se montrent les fidèles héritiers des traditions culturelles de la France.

L’humanisme est profond dans les masses laborieuses. Elles se sont, bien avant qu’il ne devienne une réalité, bercées du rêve d’une société profondément humaine. C’est l’idéal humain qui animait la Révolution française. C’était un songe humanitaire qui guidait les socialistes utopistes.

Nous sommes attachés à la raison, mais notre humanisme nous garde de tomber dans l’excès qui consisterait à tout réduire à la froide raison.

On a voulu nous présenter comme des théoriciens sans entrailles, des donneurs de férule, des livresques, et des cœurs secs...

La vérité est tout autre.

Le communisme ce n’est pas l’inhumain, c’est l’humain. Le communisme sait les immenses valeurs du sentiment, il comprend les raisons du cœur.

L’humanisme des masses s’exprime par la solidarité qui fait que le voisin ne peut sentir souffrir son voisin sans lui porter secours, quels que soient les risques qu’il puisse y trouver. Et notre sens de solidarité ne nous empêche pas de voir – bien au contraire – ce qu’il y a d’humain dans l’attendrissement et dans le besoin de bonté de la charité.

Certes, nous savons bien que la charité n’est pas une solution au problème social. Mais nous savons aussi qu’elle est l’une des expressions du cœur, l’une des formes de l’amour humain.

Cette unité que nous prêchons ardemment, cette union de la nation française que nous préconisons, elles sont le reflet chez nous et l’organisation du sentiment de fraternité et d’amour des masses.

CONTRE LA HAINE

Avec l’amour, nous retrouvons une fois de plus l’individu pantelant, froissé, blessé, violenté par le capitalisme. Le capitalisme s’acharne à tuer l’amour en rendant triviales ses délicatesses par la contamination de l’argent et en professant la haine.

Il enseigne le terrible « chacun pour soi » ; il crée la solitude de l’homme.

Alors que le communisme met en action et glorifie l’amour humain, alors qu’il se félicite de la juste importance que l’intelligence lui accorde, le fascisme, lui, marche le poignard à la ceinture, arme les petits enfants, glorifie la haine. Il célèbre le culte de la haine : haines raciales, haines nationales, haines personnelles. Contre cette affreuse propagande de haine, le Parti communiste tout entier se lève.

Nous ne voulons pas qu’on oppose une moitié de la France à l’autre moitié, nous qui savons que les ennemis et les exploiteurs du peuple ne représentent qu’une poignée de ploutocrates, les maîtres, toujours moins nombreux, des moyens de production et d’échange : les trusts.

Nous n’acceptons pas de considérer comme perdue pour la démocratie, la vérité et la raison, l’écrasante majorité de ces quatre millions de Français qui se sont prononcés contre le Front populaire.

S’ils se sont trompés, c’est à nous d’avoir assez de patience et d’amour pour leur expliquer leur erreur.

Nous souffrons de la lutte des classes. Nous la subissons et nous voulons l’abolir.

On reproche à nos amis de saluer le poing levé ?

Les agents français de Hitler et de Mussolini saluent, eux, à l’italienne ou à l’allemande. Ainsi leur salut est l’aveu de l’inspiration qui les guide.

Nous ne tenons aucunement, nous communistes, à telle ou telle forme de signe de ralliement.

Maurice Thorez , secrétaire général de notre Parti, déclarait le 25 juillet 1936, « qu’il n’estimait pas indispensable de lever le poing, pourvu qu’on soit vraiment résolu à servir la cause du peuple ». Et nous n’avons jamais voulu mettre une menace dans le salut viril du poing levé. Notre joie c’est de l’abaisser et de l’ouvrir.

Nous allons, la main tendue vers tous les hommes de bonne volonté.

Nous luttons avec ferveur contre la domination de la violence.

La théorie et la pratique de la violence dans le monde, c’est le fascisme.

Toute l’histoire de la conquête de la liberté n’a été que la lutte de la vaste humanité des faibles contre la violence de l’étroite minorité des puissants.

La violence est l’ennemie de l’intelligence.

Aux côtés de l’intelligence, nous protégeons contre la brutalité montante, tout ce qui contribue à l’affinement des relations humaines. Nous sommes attachés à cette sélection de grâce et de mesure qui s’appelle la politesse française.

L’UNITE POUR LA LIBERTE

Est-ce à dire que, devant la violence, nous acceptions de nous offrir en proie désarmée à ses excès ?

Pas le moins du monde.

La passivité n’est qu’un encouragement aux violents ; la non résistance est en définitive la reconnaissance de la violence.

Seule l’union permet de vaincre la violence fasciste.

Nous en avons fait l’expérience en France, lorsque, à l’appel des communistes, a commencé à monter, après le 6 février, la vague d’unité populaire qui devait barrer la route aux factieux. Les muscles et l’intelligence ont fait la chaîne. C’est que, dans l’union de tous les hommes de bonne volonté contre les fauteurs de violence, les intellectuels devaient avoir une place de choix. Ils ont élevé la voix et ils ont été entendus. Il en a toujours été ainsi dans le passé, il en sera ainsi dans l’avenir.

La reconnaissance que leur vouent les masses est pour eux, nous en sommes sûrs, la meilleure des récompenses et l’une des plus grandes parmi leurs raisons d’espérer.

Elle est la garantie de la remise en ordre de la France.

Alors que les fascistes exploitent au service des oligarchies le désordre économique et la pourriture du monde capitaliste, l’intelligence et le communisme s’efforcent de rétablir l’ordre et de rendre la santé aux nations.

Ils veulent bâtir un monde intelligent.
Le communisme, initiateur du Front populaire, a fait, en France, reculer la violence fasciste.

A la violence, il a opposé la force de l’idée, la force de la raison, la force du cœur, la force de la liberté, la force des masses. Il a prouvé par là que le fascisme n’était en rien une phase fatale de l’évolution des sociétés dans la période du pré-socialisme.

Le communisme a déjà brisé la première attaque fasciste. Il aidera l’intelligence à achever de vaincre la bête.

Il est le Parti de la Victoire, parce qu’il est le Parti du Travail !

III L’INTELLIGENCE ET LE PAIN

Le type même du désordre triomphant dans le monde actuel, c’est l’économie capitaliste. L’intellectuel voudrait-il se réfugier dans sa fameuse tour d’ivoire, qu’il ne le pourrait plus.

L’économie du monde à l’envers l’a dynamitée. Elle s’est effondrée comme un château de cartes.

L’intellectuel constate ce paradoxe que l’homme qui a soumis les forces de la nature devient l’esclave de l’économie qu’il a créée.

Les grands maîtres du socialisme ont toujours montré et dénoncé ces contradictions inévitables. Sous la domination du profit l’individu perd de plus en plus sa chance de mise en valeur. Il ne se réalise pas. Et l’humanité perd le bénéfice de la réalisation de l’individu.

Le régime du profit arrache ou dispense parcimonieusement leur pain aux intellectuels et aux artistes. Et avec le fascisme, il leur offre « des canons à la place de beurre ».

Il les réduit à la portion congrue, créant ainsi pour eux de mauvaises conditions de production. Il les contraint à pratiquer un certain malthusianisme de l’esprit. Il leur reproche d’exister. Il les déclasse. Il se plaint amèrement de la « surproduction intellectuelle ».

Où il est responsable, avec son appétit de lucre, il dénonce la machine et la désigne à la colère des masses.

En s’attaquant à la machine, en inventant de toutes pièces le prétendu conflit de l’homme et de la machine, il s’attaque à l’Esprit qui l’a créée.

Les crises ne sont pas autre chose, comme l’a fort bien dit Maurice Thorez, que la révolte des machines modernes contre la forme de propriété des grands moyens de production.

La machine n’est pas l’ennemie de l’homme, elle est l’ennemie du capitalisme.

PAS D’EMBAUCHE !

Le capitalisme, en France, veut contingenter l’intelligence. Ses porte-paroles et ses porte-plumes s’y emploient.

C’est M. Laffite, de l’Union Nationale des Etudiants de France, qui, dans « l’Illustration », signale que le pays est prêt à engendrer « un prolétariat intellectuel redoutable par sa masse, sa culture et son amertume ».

C’est M. Buré, qui, citant Modeste Leroy, dans « l’Ordre », s’écrie qu’on forme « des apprentis déclassés qui seront peut-être de dangereux perturbateurs »...

Alors que Danton disait : « l’instruction est, après le pain, le premier besoin du peuple », M. Caillaux proclame au contraire : « il faut arrêter le Prométhée de la Science. » Il ajoute : « Il faudrait tempérer les aspirations déraisonnables qui se font jour dans l’esprit des pauvres et des humbles. »

Et le même Buré, que je cite plus haut, écrit, avec le mérite de la franchise, qu’une large diffusion de la culture est peut-être « compatible avec le régime communiste, mais non pas avec le régime capitaliste ».

M. Flandin ne s’exprime guère autrement lorsqu’il déclare dans une interview de « Candide » : «  Il est temps de recréer des terrassiers, des maçons des couvreurs, dont la France a plus besoin que de licenciés ès-lettres. »

Il n’y a qu’un malheur. C’est qu’en l’état actuel des choses, on n’utilise pas davantage la culture des maçons, des terrassiers et des couvreurs que celle des licenciés ès-lettres. Les uns et les autres chôment.

La classe dirigeante est prise de panique devant ce qu’elle appelle « la surproduction intellectuelle ».

« Ne faites pas de vos fils des médecins ! » s’écrie le docteur Balthazar.

« N’allez pas aux colonies ! » s’écrie M. Gourdon, directeur de l’Ecole Coloniale.

« Et surtout, pas de retour à la terre ! » concluent les gros fermiers en examinant les statistiques de leurs bureaux de placement.

« Entre ingénieur ? » s’exclama M. Paul Dubois, secrétaire de l’Union des Syndicats d’Ingénieurs, « gardez-vous-en bien ! Les ingénieurs désormais sont destinés à devenir des clochards, et s’ils sont privilégiés, à pousser avant l’aube un diable aux Halles, ou à faire des gardiens de nuit sur les chantiers. »

On considère comme un désastre que le nombre des étudiants de nos facultés soit passé en trente ans de 30.000 à 87.000, et que le rayonnement de la culture française attire aujourd’hui dans nos universités 17.000 étudiants étrangers, au lieu de 1.700 en 1910.

Cependant, le nombre des illettrés est encore important et le nombre de semi-lettrés considérables en France. Et il est écrasant dans les colonies. L’intelligence n’est pas surproduite, elle est mal distribuée. On manque de médecins aux portes de Paris (en Seine-et-Marne, par exemple, il y en a pour 1.971 habitants). Aux colonies, dans l’ensemble, il n’y a que 450 médecins civils pour 44 millions d’habitants.

L’absence de médecine sociale – seule efficacement préventive – sacrifie par la tuberculose, l’alcoolisme, la syphilis, le cancer, l’avortement, des dizaines de milliers d’êtres chaque année, dans un pays où se joue le drame de la dépopulation. Des richesses immenses ne sont pas exploitées – ne s’agirait-il que de la houille blanche – qui pourraient employer une armée d’ingénieurs. Les laboratoires sont délabrés, sans outillage, sans argent. Les inventeurs désintéressés meurent de faim. Les musées sont insuffisants et presque toujours mal classés, les bibliothèques populaires sont lamentables. Le théâtre se meurt. Les concerts sont réservés à une mince couche d’amateurs. Les artistes – considérés comme un luxe pour la classe dirigeante – restent coupés de leur public de masse. Le cinéma et la radio sont asservis à l’argent et stérilisés. La maison ouvrière, qui devrait occuper à sa construction des milliers d’architectes, de décorateurs, de peintres, reste le vieux taudis ou la boîte à loyers sans décor. Le lieu de rassemblement des travailleurs, qui devrait être le club ou la maison du peuple, avec son cinéma, sa T.S.F., ses expositions, son musée, sa bibliothèque, son théâtre et ses concerts, demeure la salle de bistrot du coin, avec son alcool, ou le hall des Prix Uniques. Pas d’embauche pour l’intelligence !

LE MONDE A L’ENVERS

La France, avec toutes ses richesses intellectuelles de vieille et magnifique civilisation, laisse, par la faute du capitalisme, dépérir les forces de l’esprit ; elle les réduit à la démoralisation du chômage, au désespoir de l’impuissance. Elle laisse en jachère des intelligences par millions, elle voue à la destruction une quantité importante de celles qui sont formées et n’en laisse subsister qu’une minorité, à condition qu’elles acceptent d’être durement asservies à l’argent.

Ce faisant, elle est absolument dans la logique d’une économie qui, lorsque 30 millions de chômeurs peuplent le monde de leur faim, détruit en quelques mois sur la surface de la terre, 886.000 wagons de blé, 114.000 wagons de riz, massacre et soustrait à la consommation américaine 600.000 vaches et 6 millions de porcs, sacrifie 20.000 vaches laitières en Hollande, ensevelit 550.000 moutons en Argentine, brûle l’orge et l’avoine au Canada, flambe le coton en Egypte, noie au Brésil 34 millions de sacs de café par an, fait des bûchers de 13 millions de tonnes de canne à sucre à Cuba et, en France même, voue à la chaux vive des vaches pseudo-tuberculeuses, arrache les ceps de vigne, dénature le blé pour le donner aux cochons ou le laisse charançonner dans les silos et décide de briser dans le Nord les machines du dernier modèle dans certaines fabriques du textile.

Dans ce que j’appelle le monde à l’envers, dans ce monde barbare de 1936 où l’abondance crée la misère, l’intelligence subit la loi de l’absurdité économique qui l’entoure et de la monstruosité sociale qui constitue la suprématie du profit.

C’est donc à l’intelligence de s’insurger, de réagir sur les causes de son avilissement et de devenir cause à son tour dans la remise en marche de l’économie... C’est à elle de contribuer, aux côtés du prolétariat, à remettre le monde à l’endroit.

IV SOLUTIONS

Il ne s’agit pas pour cela de détruire la machine. Tout au contraire, il s’agit de la perfectionner encore. Et si elle risque d’éliminer de nouveaux hommes de la production, il ne s’agit que de transformer le chômage en loisir. Le progrès technique et les masses exploitées seront les fossoyeurs du capitalisme.

Tout le problème est là. Mettre la machine au service de l’homme et cesser de faire de l’homme l’esclave de la machine. Rompre avec cette économie où des insectes aveugles travaillent désespérément et sans arrêt à construire un monde dont ils ne profitent pas et qui les tue.

La technique moderne mise au service de l’homme permet d’envisager une utilisation de toutes les énergies valables par la diminution des heures de travail avec maintien d’un salaire vital.

Mais il faut la délivrer du profit capitaliste dont la logique interne est de créer le chômage, de s’en servir pour menacer les salaires, d’exiger du même ouvrier des heures supplémentaires plutôt que d’organiser le travail en plusieurs équipes.

Dans une société remise à l’endroit, le développement des loisirs rend aux travailleurs cette richesse inestimable qu’est l’amour du métier. Il réveille l’intelligence créatrice, diffuse la culture, donne enfin un public aux artistes, aux écrivains, aux dramaturges, aux poètes…

La Société nouvelle du travail sera dirigée par la raison et par l’intelligence ou elle ne sera pas.

Comment y parvenir ? Comment arrêter le rouleau compresseur des trusts broyant la société ? Comment arrêter la marche de la ploutocratie levant le drapeau du désordre et de la haine ?

Certains ont voulu montrer le fascisme comme le rénovateur de l’économie. Nous avons vu ce qu’il en fallait penser. Le fascisme consolide le désordre économique et si sa démagogie sociale jette quelquefois du lest, c’est uniquement pour permettre à la vieille injustice de tenir l’air un peu plus longtemps.

Mais le fascisme continue à asservir l’Esprit au matérialisme capitaliste.

UNION DE L’INTELLIGENCE ET DU TRAVAIL

Le communisme, lui, donne toute sa part et toute sa valeur au travail intellectuel.

Il veut faire une France heureuse. Une France propre. Une France jeune !

Il veut surtout discipliner les forces aveugles et il sait que seule la raison reconnue comme force dirigeante peut y parvenir.

Il veut surtout en finir avec l’absurde.

Mais il n’y a pas plus de création spontanée dans le domaine économique que dans les autres. Le monde à l’envers ne mourra pas de sa seule absurdité et ce sont les cerveaux et les masses des hommes qui créeront le monde nouveau.

A l’intelligence de prendre sa place, maintenant, et toute sa place, dans l’exécution de cette tâche.

Nous avons tout fait et nous ferons tout pour que, en vue de la tâche commune, les intellectuels et les ouvriers se comprennent pleinement.

L’intelligence sent de plus en plus la force magnifique constituée par une classe ouvrière sortie de l’enfance, consciente et de ses droits et de ses devoirs, respectueuse des machines, assoiffée de connaissances et orientée désormais vers les tâches constructives. Quant aux travailleurs, ils ont une affection passionnée pour les grands esprits qui vont au-devant d’eux.

L’ouvrier qui ne connaît pas Platon n’est pas plus responsable de son ignorance que ne l’est de la sienne l’helléniste qui ne sait pas planter un clou sans se frapper sur les doigts.

Les gens cultivés comprennent de plus en plus qu’il existe une culture ouvrière et une culture paysanne.

Demandez à un ouvrier mécanicien de vous expliquer le détail de la mise au point d’un moteur et vous serez étonné de la somme de connaissances, d’expériences, de culture en un mot, dont il fera preuve. Il en sera de même pour le paysan qui vous parlera de l’art du labourage, pour le vigneron qui vous parlera de la science du vin.

C’est que la Culture est faite de l’ensemble du travail productif de l’homme dans l’espace et dans le temps. Elle est l’addition de l’effort de celui qui travaille plus spécialement de ses mains et de celui qui travaille plus spécialement de son esprit.

C’est la force ouvrière qui, dans le passé, a conquis les 8 heures et qui, récemment, a obtenu de nouvelles lois sociales qui sauvegardent en même temps que sa vie, sa dignité. Qui ne se rend compte que les conquêtes des masses ouvrières sont autant de garanties pour la protection du travail intellectuel ?

C’est de l’addition des forces ouvrières et paysannes, avec les forces de l’esprit que dépend la création de l’homme nouveau.

Les intellectuels qui, au milieu de la misère présente, restent animés du plus noble idéalisme, sont préoccupés par l’avenir de la France et du Monde.

Le Parti communiste montre la voie de l’action, de la vérité, de l’amour, de la liberté et de la paix. Il ne s’agit pas d’imiter servilement tel ou tel pays. L’U.R.S.S. s’est libérée dans des conditions propres à la Russie et nous l’en admirons d’autant plus. Mais chaque pays donnera, selon ses traditions nationales et son degré d’évolution, son aspect particulier au socialisme.

Dans cette tâche, le Parti communiste français se sent profondément le continuateur de la France.

NOUS CONTINUONS LA FRANCE

Nous continuons la France, la France généreuse, accueillante, compréhensive, rayonnante, toute de mesure et de goût. La France qui ne peut connaître les excès du racisme, elle qui est la somme harmonieuse de tant de races, puisque sa situation géographique d’extrême-cap de l’Europe en a fait le point où les invasions sont venues se heurter à la mer et arrêter leurs vagues, la coupe où elle se sont décantées, le filtre où elles ont laissé leurs échantillons humains quand elles ne s’arrêtaient pas...

La douceur de son climat, ses ressources, l’heureuse disposition de ses plateaux et de ses vallées, y ont fixé les hommes de bonne heure, et les ont incités aux travaux de l’esprit. Il y a plus d’un trait commun entre la grâce d’un renne gravé et peint par un chasseur préhistorique sur la paroi d’une grotte ornée de la Dordogne ou de l’Ariège, et celle du cerf qui surmonte la porte du château d’Anet.

C’est de cet ensemble de richesses culturelles que nous nous sentons les héritiers.

Nous continuons la France. Nos militants sont profondément enracinés à son sol. Leurs noms ont la saveur de nos terroirs. Notre ardeur à conquérir notre patrie pour les plus grandes masses qui en sont encore expropriées, vient de l’amour que nous avons pour notre pays et de notre volonté d’internationalistes que son rayonnement aide toutes les nations à retrouver, dans la paix, leur indépendance et à développer leur culture nationale, dans la marche en avant de la civilisation universelle.

Nous continuons la France. Et c’est parce que nous continuons la France que nous voulons sauver la culture. Et c’est parce que nous voulons sauver la culture et que, dès nos premiers pas, nous avons eu l’appui d’Anatole France, de Henri Barbusse, de Raymond Lefebvre, que nous voyons maintenant marcher à côté de nous, quelques-uns parmi les plus grands d’entre les savants, les professeurs, les écrivains et les artistes français de ce temps, autour d’André Gide, de Romain Rolland, de Malraux, de Jules Romains, de Benda, de Luc Durtain, de Vildrac, d’Aragon, de Lenormand, de Jouvet, de Lurçat, de Langevin, de Perrin, de Prenant, de Wallon, de Jean-Richard Bloch, de Dullin, de Moussinac, de Jean Renoir, de Francis Jourdain, de Le Corbusier, de Léger et de tant d’autres.

Nous continuons la France. Et c’est pourquoi nous en appelons, en même temps qu’à l’intelligence, à la jeunesse sacrifiée, à son esprit combatif, à son désir « que ça change », à son besoin de sacrifice, à son désintéressement, pour lui faire comprendre le monde et pour essayer avec elle de le mettre enfin à l’endroit.

Notre monde à l’envers est une cinquante chevaux en parfait état de marche, dont le conducteur exige qu’elle soit tirée par une paire de bœufs et que, par surcroît, il met en marche arrière.

Il est temps que l’esprit nous aide à mettre les jeunes réalités dans de
jeunes formes.

C’est la vocation de l’intelligence.

L’INTELLIGENCE A LA CROISEE DES CHEMINS

En décidant de leur propre sort, en choisissant la bonne route, les intellectuels décideront du sort de l’humanité.
L’intelligence est à la croisée des chemins.
Il lui faut choisir !
La guerre ou la paix,
La servitude ou la liberté,
La haine ou l’amour,
Le mensonge ou la vérité,
La passivité ou l’action
La misère ou le bien-être créateur ?
Qu’elle décide !
Une vaste réunion des intellectuels français pourrait apporter à la France la somme de leurs méditations, de leurs recherches, de leurs solutions des problèmes, de leurs connaissances techniques, de leur expérience.

Les maîtres de la science et de l’art doivent être consultés et entendus.

Il ne s’agit pas de réunir un parlement de parleurs, il faut constituer une assemblée qui travaille.

La société malade appelle en consultation ses médecins.

Nous, communistes, sommes persuadés que l’intelligence française peut apporter aux problèmes posés des solutions insoupçonnées.

Nous ne connaissons encore que fragmentairement ses tragiques cahiers de doléances. Ils sont encore retenus dans la retraite, modeste et comme pudique, des bureaux et des laboratoires.

Il faut que l’intelligence dresse son réquisitoire complet et qu’elle motive ses arrêts.

Nous proposons la convocation des Etats généraux de l’intelligence française.

Trop longtemps les intellectuels ne sont apparus qu’à travers le miroir déformant de leurs opinions politiques.
Il faut, cette fois, qu’ils se réunissent, d’où qu’ils viennent, et qu’ils décident souverainement.

Trop souvent la France a été gérée par des improvisateurs et des bavards.

Maintenant, c’est aux hommes qui ont pénétré jusqu’au fond les problèmes, de décider.

C’est à l’Esprit que le Parti communiste français, parti des masses travailleuses, fait confiance pour l’aider à résoudre les problèmes de la paix, de la liberté et du pain des hommes.

C’est à l’esprit de préparer et de proclamer à nos côtés la victoire de la dignité humaine.

 

GABRIEL ROCKHILL EDITA LA OBRA DE DOMENICO LOSURDO “EL MARXISMO OCCIDENTAL”

 Gabriel Rockhill y Jennifer Ponce de León han escrito la Introducción a la versión inglesa de El Marxismo Occidental, titulada “El socialismo como liberación anti-colonial: lecciones contemporáneas de Losurdo”, en la que no sólo delinean las ideas-fuerza de Losurdo y el método de análisis que aplica en esta obra, sino que también ofrecen interesantes reflexiones sobre la “industria de la teoría” y el “socialismo realmente existente”.

Por TITA BARAHONA PARA CANARIAS-SEMANAL.ORG

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    En el sistema capitalista, la burguesía posee los medios de producción, pero también posee y/o controla los medios intelectuales de producción cultural (universidades, centros de investigación, think tanks), cuyos productos se difunden a través de libros, revistas científicas y diversos medios de comunicación. Igual que hay una industria de la música, del cine o del espectáculo, también existe lo que Gabriel Rockhill conceptualizó como la “industria de la teoría global”, un sistema de producción, circulación y consumo de los productos de la alta cultura, como la teoría, que opera dentro de los límites de lo que la burguesía considera idóneo o legítimo para el uso del publico en general (1).

   Si hemos leído a -o al menos nos suenan- autores como Horkheimer, Adorno, Foucault, Derrida, Negri, Butler o Zizek, es posible que hayamos tenido menores ocasiones de toparnos con otros prominentes pensadores contemporáneos como Domenico Losurdo (1941-2018). Es cierto que buena parte de las obras de este autor italiano han sido traducidas al castellano y otros idiomas (2); pero, comparadas con las de los autores arriba referidos, seguramente encontraremos que las de Losurdo tienen bastantes menos citas en artículos académicos y periodísticos. Además, él no tuvo tantas oportunidades de ser entrevistado en los grandes medios o invitado a dar charlas en eventos patrocinados por instituciones financieras (3).

   Las razones de que la obra de Losurdo no sea un producto estrella de la “industria de la teoría global” las explican brillantemente Gabriel Rockhill y su colaboradora, Jennifer Ponce de León (4), en las 30 páginas de Introducción a la recién publicada versión inglesa de uno de sus libros: Western Marxism. How it was born, how it died, how it can be reborn (El Marxismo Occidental. Cómo nació, cómo murió y cómo puede renacer), editado por Rockhill y publicado en Monthly Review Press (Nueva York, 2024).

   En esta introducción, titulada “El socialismo como liberación anti-colonial: lecciones contemporáneas de Losurdo”, sus autores delinean las ideas-fuerza de Losurdo y el método de análisis que aplica en esta obra, publicada originalmente en 2017. Trata en ella el autor italiano de una de las mayores divisiones que se produjeron dentro de los debates del marxismo a nivel mundial: “Marxismo oriental” versus “Marxismo occidental”, división que “marcó a la generación de Losurdo y continúa estructurando muchas de las controversias actuales”.

   Desde la década de 1970, que es cuando Losurdo sitúa el surgimiento de este cisma, se llamó marxistas orientales a quienes habían logrado tomar el poder, como en los casos de la URSS, Vietnam, Corea, China, Cuba, etc. Marxistas occidentales se denominó, por otro lado, a los intelectuales que se opusieron a esos proyectos de construcción del socialismo, porque -como explican Ponce de León y Rockhill- “rechazaban la aspiración a la toma del poder en favor de diversas formas de teoría crítica y a veces presentando ese rechazo como la postura epistemológica desde la que mejor se puede descubrir el llamado auténtico marxismo”.

   Oriental y occidental no son, sin embargo, términos estrictamente geográficos, sino que se refieren más bien a dos posturas políticas diferentes, la una dedicada a la ardua tarea de construir el socialismo, lo que hasta ahora se ha producido sobre todo en el Sur Global; la otra desdeñosa de esos esfuerzos y quitándoles importancia, “porque no están a la altura del estándar imaginado de pureza teórica o moral”.

   A este último renglón pertenecen las corrientes filosóficas derivadas de la Escuela de Frankfurt y la teoría francesa, entre otras, con las que Losurdo polemiza. Por tanto -señalan Ponce de León y Rockhill- “gran parte de lo que éste diagnostica en su libro se puede aplicar -salvando las distancias- a muchas otras tendencias promovidas por la industria de la teoría, algunas de las cuales son abiertamente anti-marxistas, incluidas la teoría post-colonial, la teoría decolonial, el feminismo liberal y la teoría queer, el afro-pesimismo, etc."

   Un tema central en el libro de Losurdo es su respuesta al de Perry Anderson Considerations on Western Marxism (1976), para quien el hecho de que el socialismo no se extendiera fuera de la URSS fue “producto de una derrota”. Este supuesto fallo del gobierno de los soviets fue motivo para que los marxistas occidentales se retiraran de los partidos y los asuntos políticos y económicos, se refugiarsen en la Academia y centrasen sus intereses en la Filosofía y la Estética.

   Sostienen Ponce de León y Rockhill que “el oportunismo de los marxistas occidentales, criticado por Losurdo, debe entenderse a través del análisis de los intereses de clase". Todos ellos son “intelectuales profesionales acomodados en las redes de elite del Norte Global y parte de lo que algunos llaman la nueva pequeña burguesía, es decir: el estrato de clase profesional-directiva del centro imperialista”.

   La CIA prodigó sustanciosos fondos a estos intelectuales izquierdistas anti-comunistas y promovió sus obras en todo el mundo. Ponce de León y Rockhill señalan la operación, en la década de 1950 -en plena Guerra Fría- del Congress for Cultural Freedom (Congreso para la Libertad Cultural), “uno de los mayores patrocinadores del arte y la cultura que el mundo ha conocido. Estableció oficinas en treinta y cinco países [...], planificó o patrocinó 135 conferencias y seminarios internacionales, publicó al menos 170 libros, dirigió revistas […] Prominentes marxistas occidentales, como Horkheimer, gozaron de sus viajes pagados. Otros, como Adorno, vieron sus obras publicadas y traducidas en sus revistas.”

   Los escritos de estos marxistas occidentales -según explican Ponce de León y Rockhill- suelen “promover las dinámicas del imperialismo cultural y a la vez ellos son promovidos por el aparato cultural burgués, que los vende en todo el mundo como la única versión válida de marxismo”. Estos enfants terribles de la Academia “produjeron teorías que tienen poco o ningún valor de uso para las luchas de las masas trabajadoras y oprimidas”.

   A la misma hornada parecen pertenecer los “neo-marxistas” y “post-marxistas” con los que polemiza agudamente Andrés Piqueras en De la decadencia de la política en el capitalismo terminal (5), apoyando la argumentación de Losurdo en El Marxismo Occidental.

   Unos y otros son lo que Rockhill denomina “recuperadores radicales”, porque “pretenden recuperar potenciales fuerzas insurgentes dentro del orden capitalista, guiando a las masas hacia soluciones simbólicas o discursivas”, como lo es el consumo de los productos de “la industria imperialista de la teoría”.

   Es posible que a muchos de nosotros no nos sea difícil percibir el hilo que conecta a estos “recuperadores radicales”, que dicen representar los intereses de los oprimidos mientras carecen de un programa práctico para la transformación social, con la “izquierda compatible” o “izquierda integrada” (ya despojada de cualquier resto de marxismo y anti-comunista), que se alterna en los gobiernos de nuestras democracias burguesas con la derecha, para hacer las mismas políticas de corte neoliberal.

   En el polo opuesto se halla el compromiso militante de intelectuales como Losurdo, su dedicación a lo que en su obra sobre Gramsci llama el “comunismo crítico”, que -como sostienen Ponce de León y Rockhill- “elude el dogmatismo en favor de un proceso continuo de aprendizaje enraizado en el análisis concreto de coyunturas históricas específicas”.

   En El Marxismo Occidental, Losurdo "elucida las fuerzas objetivas que mueven la ideología de esta corriente a la que considera producto cultural del centro imperialista". Como en todos sus escritos, aplica para ello “un análisis sobrio de la realidad concreta, que es profundamente histórico”. Es, por tanto -concluyen Ponce de León y Rockill, “un antídoto inestimable a esta tendencia anti-comunista y pro-imperialista dentro del marxismo occidental”.

   Añado para terminar que, seguramente, seremos muchos quienes nos preguntemos si podemos llamar marxismo en absoluto a elucubraciones teóricas despojadas de práctica revolucionaria, dado que un elemento central en la elaboración marxista es el método dialéctico, la permanente imbricación de la teoría y la intervención social. El marxismo es, como lo denominó Gramsci, filosofía de la praxis: “No hay un pensamiento sin influjo sobre la realidad, ni una realidad que no determine el pensamiento (6).

   En cualquier caso, la calidad del libro de Domenico Losurdo y la no menor de su introducción en la versión inglesa lo hacen sumamente recomendable.

 

Referencias

(1) Gabriel Rockhill (nacido en 1972) es un filósofo, escritor, crítico cultural y activista estadounidense. Realizó sus estudios superiores en Francia y actualmente es profesor de Filosofía en la Universidad de Villanova de Filadelfia. Es asimismo director-fundador del Taller de Teoría Crítica y contribuye regularmente al debate intelectual público en medios como CounterPunch, Black Agenda Report, el New York Times y Libération, entro otros. También en Canarias Semanal hemos publicado algunos de sus artículos. Sobre el concepto “industria de la teoría global”, véase la entrevista que le hicimos en este medio: https://canarias-semanal.org/art/33563/gabriel-rockhill-la-industra-de-la-teoria-global-capitalista-al-descubiero-video

(2) La obra de la que aquí tratamos, El Marxismo Occidental, cómo nació, cómo murió, cómo puede ser resucitado, fue publicada por la editorial Trotta en 2019. En la editorial El Viejo Topo se pueden encontrar otros títulos de Losurdo: Stalin. Historia y crítica de una leyenda negra (2011); Contrahistoria del liberalismo (2007); La lucha de clases (2014); La izquierda ausente (2015); Un mundo sin guerras (2016) y su obra póstuma La cuestión comunista (2021).

(3) Ciñéndonos sólo al caso español, el Banco de Santander patrocinó en 2021 una charla de Judith Butler en el Museo Reina Sofía de Madrid. Como una de las principales intelectuales de la industria de la teoría, ha sido objeto de múltiples noticias y entrevistas en los grandes medios. También recibió el Premio Internacional Cataluña que otorga la Generalitat, y la Medalla de Oro del Círculo de Bellas Artes de Madrid. Véase https://canarias-semanal.org/art/33459/judith-butler-o-el-fetichismo-de-la-mercancia-intelectual y https://canarias-semanal.org/art/29396/judith-butler-la-pope-del-feminismo-postmoderno-y-su-apoyo-al-capitalismo-yanqui

(4) Jennifer Ponce de León es profesora asociada de Inglés en la Universidad de Pensilvania. Está también especializada en estudios sobre América Latina a partir de la década de 1960 y Literatura Comparada. Su investigación se centra en los movimientos izquierdistas y la producción cultural en las Américas y en el pensamiento marxista y anti-colonial. Es directora asociada del Taller de Teoría Crítica. Actualmente trabaja en un libro, Revolutionizing Aesthetics, en co-autoría con Gabriel Rockhill.

(5) Andrés Piqueras, De la decadencia de la política en el capitalismo terminal. Un debate crítico con los “neo” y los “post” marxismos. También con los movimientos sociales (El Viejo Topo, 2022)

(6) Citado en Andrés Piqueras, De la decadencia de la política, p. 321.

 

Los Juegos Olímpicos de París 2024: el «capitalismo de celebración» en torno a la Torre Eiffel

 SOURCE: https://rebelion.org/los-juegos-olimpicos-de-paris-2024-el-capitalismo-de-celebracion-en-torno-a-la-torre-eiffel/

Fuentes: Rebelión [Foto: La Torre Eiffel decorada con los anillos olímpicos durante las últimas Olimpiadas, 
julio de 2024 (Wikimedia)]

Traducido del inglés para Rebelión por Beatriz Morales Bastos

Sin lugar a dudas, la Torre Eiffel fue el centro de atención y la superestrella de los recientes Juegos Olímpicos de París, lo cual es comprensible, puesto que la obra maestra de Gustave Eiffel es desde hace mucho tiempo el emblema de la ciudad. No obstante, la Torre también es un símbolo de la riqueza y el poder de la burguesía, de la “clase capitalista”, un patriarcado en cuyas filas también se incluyen las damas y caballeros del Comité Olímpico Internacional (OIC, por sus siglas en inglés). Una brizna de historia puede ayudarnos a entender el papel fundamental que ha desempeñado la Torre Eiffel en el reciente gran espectáculo olímpico de la “Ciudad de la Luz”.

Sin lugar a dudas, la Torre Eiffel fue el centro de atención y la superestrella de los recientes Juegos Olímpicos de París, lo cual es comprensible, puesto que la obra maestra de Gustave Eiffel es desde hace mucho tiempo el emblema de la ciudad. No obstante, la Torre también es un símbolo de la riqueza y el poder de la burguesía, de la “clase capitalista”, un patriarcado en cuyas filas también se incluyen las damas y caballeros del Comité Olímpico Internacional (OIC, por sus siglas en inglés). Una brizna de historia puede ayudarnos a entender el papel fundamental que ha desempeñado la Torre Eiffel en el reciente gran espectáculo olímpico de la “Ciudad de la Luz”.

La columna de acero de Eiffel se erigió en 1889 para conmemorar el centenario del inicio de la “Gran Revolución” de Francia en 1789, pero también para borrar la memoria de otras revoluciones menos “grandes”, pero más recientes y muy traumáticas, es decir, las de 1848 y 1871, esta última conocida como la Comuna de París. Todas esas revoluciones fueron estallidos de una compleja lucha de clases entre pobres y ricos. Se solía denominar a las personas pobres “ceux d’en bas”, “los de abajo”, o “le menu peuple”, “el pueblo humilde”, pero también se les puede describir como el “demos”, una palabra de origen griego que encontramos en la palabra “democracia” y significa “poder por y para el pueblo humilde”. En cualquier caso, eran (y son) el tipo de personas que pueden esperar cambios revolucionarios para mejorar su en general miserable suerte, por ejemplo, en forma de la bajada del precio de para el pan y de otros artículos de primera necesidad. Mirando por encima del hombro a las personas pobres estaban “ceux d’en haut”, “los de arriba”, es decir, las personas ricas situadas en lo más alto de la pirámide social, la nobleza y la burguesía, los burgueses acomodados que consideraban que el orden social y económico establecido era bastante satisfactorio y tenían horror de la idea de cambios revolucionarios. No es de extrañar, por lo tanto, que las revoluciones que Francia experimentó en 1789, 1830, 1848 y 1871, y que tuvieron lugar la mayoría de ellas, aunque no todas, en París, fueran en gran parte obra de los hombres y mujeres “humildes” de la capital del país.

No hay que subestimar los logros democráticos de esas revoluciones, porque, por ejemplo, fue durante el gran levantamiento de 1848 cuando se introdujo el sufragio universal y se abolió la esclavitud. Sin embargo cada revolución presenció el “secuestro” de las revoluciones por parte de miembros de la burguesía, que lograron así alcanzar los objetivos políticos “liberales” y socioeconómicos capitalistas de su clase, lo que se hizo a expensas de la nobleza y de la Iglesia, pero, sobre todo, de “las personas de abajo”, cuyos esfuerzos por llevar a cabo reformas democráticas de gran alcance se reprimieron en 1848 y cuyos intentos de construir una sociedad socialista, manifestados en la Comuna de París de 1871, fueron ahogados en sangre. La burguesía se convirtió en la dueña de Francia después de ese triunfo.

Antes de la Gran Revolución de 1789 París era una “ciudad real”, que irradiaba el poder y la gloria del orden feudal de varios siglos de antigüedad cuya figura principal era el rey. Gran cantidad de edificios monumentales y vastas plazas, con imponentes estatuas de reyes, cardenales y demás, pertenecían a las clases privilegiadas de aquel “Antiguo Régimen”, la nobleza y el (alto) clero, y, por supuesto, también al rey (aunque este prefería residir en un suntuoso palacio de Versalles, lejos de la ajetreada capital y de sus “multitudes enloquecidas”). En aquel momento la imagen arquitectónica de esta “realeza” de París y principal atracción turística de la ciudad era el Pont Neuf [Puente Nuevo], el primer puente de piedra sobre el Sena, un “regalo” que el rey Enrique IV había hecho a la ciudad hacia el año 1600. El poder de la Iglesia, íntimamente asociado al rey, se reflejaba en los muchos lugares de oración y monasterios, que hacían que París impresionara (¿o intimidara?) a visitantes y residentes como una “nueva Jerusalén” católica.

La nobleza prefería residir en la parte occidental de la ciudad de París, en grandes y lujosas residencias conocidas como “hôtels”, situados en el distrito de Saint-Germain y a lo largo de la rue du Faubourg Saint-Honoré, que discurría paralela a los Campos Elíseos hasta el pueblo de Roule, encaramado en una loma que más tarde se coronaría con el Arco del Triunfo. Anteriormente los aristócratas habían vivido sobre todo en el barrio de Marais, situado en el centro de París y cerca de la Bastilla, cuyo centro era una “place royale”, “plaza real”, la actual Place des Vosges. Pero los prósperos miembros de la “prometedora” burguesía habían ocupado la mayoría de los hôtels de ese distrito. La burguesía también habitaba en otros barrios elegantes del centro de París, como la rue de la Chaussée d’Antin y las calles adyacentes, incluida la rue de la Victoire, donde residieron durante algún tiempo un joven Napoleon y su mujer, Josefina.

El “pueblo humilde” vivía en los barrios degradados y a menudo de chabolas del centro de la ciudad, que seguía siendo casi medieval, con calles estrechas, torcidas y sucias, y también en los distritos y barrios periféricos del este de la ciudad (“faubourgs”), especialmente el Faubourg Saint-Antoine, situado inmediatamente después de la Bastilla y de las demolidas murallas medievales, un sistema defensivo del que la Bastilla había sido un importante baluarte. Los faubouriens de Saint-Antoine fueron en 1789, y de nuevo en 1830 y 1848 las tropas de choque que sacaron las castañas del fuego revolucionario. Lo hicieron, entre otras cosas, asaltando la Bastilla aquel famoso 14 de julio de 1789, y atacando el palacio de las Tullerías y expulsando al rey de ahí el 10 de agosto de 1792.

En cierto modo, las revoluciones francesas consistieron en los intentos del “pueblo humilde” de conquistar París y de “quitarle su condición real” a la “ciudad real”. No es casual que en 1793, durante la “Gran Revolución”, el rey fuera ejecutado en medio de la más real de las plazas reales de París, la Place Louis XV, que más tarde se convirtió en la Place de la Concorde. Otras plazas perdieron sus nombres y estatuas regios, y los símbolos reales, como la “fleur-de-lis” [flor de lis], se sustituyeron por atributos republicanos, como la bandera tricolor y la consigna “libertad , igualdad, fraternidad”.

Este hecho de “quitar la condición real” a la capital implicaba inevitablemente “quitarle la condición clerical”, que provocó el cierre y la demolición de muchos monasterios e iglesias o en algunos casos su transformación a beneficio del “populacho” en hospitales, escuelas o almacenes para guardar grandes cantidades de harina, vino y otros alimentos esenciales, y evitar así que sus precios se dispararan en caso de malas cosechas.

La capital francesa parecía destinada a convertirse en una ciudad de y para el “pueblo humilde”, el “demos”, una ciudad literalmente democrática. Sin embargo, esta idea no agradaba en absoluto a los burgueses acomodados, que habían apoyado los movimientos revolucionarios mientras habían atacado al orden feudal establecido, pero que se sintieron amenazados y se volvieron reaccionarios cuando los revolucionarios parisinos empezaron a luchar por unos objetivos contrarios a las ideas “liberales” y a los intereses capitalistas de la burguesía. Eso ocurrió en 1792, 1848 y 1871. En cada una de estas ocasiones la burguesía logró reprimir los intentos de radicalización revolucionaria, logró frustrar los esfuerzos de hacer que París fuera más plebeyo y, en vez de ello, transformar un poco más la antigua “ciudad real” en una metrópoli burguesa.

Bajo los auspicios de Napoleon, que había sido alzado al poder por la burguesía y resultó ser un defensor a ultranza de sus intereses de clase, se llevó a cabo el aburguesamiento sistemático de París. El corso, que provenía de una familia que tanto se podía considerar de la baja nobleza como de la alta burguesía, fue en gran parte responsable de que el oeste de París (que antes de la Gran Revolución había estado monopolizado por una élite de alta cuna, la nobleza) pudiera ser colonizado por una élite de altos ingresos, la (alta) burguesía. Se consiguió gracias a la construcción de amplias avenidas, inspiradas en los ya existentes Campos Elíseos, en las que las personas ricas podían construir casas prestigiosas para vivir en ellas, o para venderlas o alquilarlas a altos precios; esas avenidas convergían en un amplio espacio en forma de estrella, la Place de l’Étoile. El oeste de París se convirtió así en el hábitat exclusivo de las personas ricas, las “gens de bien”, la clase acomodada.

Después de Napoleon y de la “Restauración” de 1815-1830, una breve vuelta tanto de la monarquía borbónica y la nobleza como de la Iglesia, se reanudó el aburguesamiento de París bajo el gobierno de un rey “constitucional” perteneciente a la Casa de Orleans, Luis Felipe, conocido como el “rey burgués” debido a que defendía unas políticas muy liberales. Y el aburguesamiento de París avanzó de forma espectacular cuando un sobrino de Napoleon gobernó Francia como emperador Napoleon III durante un par de décadas a mediados del siglo XIX. Bajo los auspicios del Prefecto del Departamento del Sena, Georges–Eugène Haussmann, conocido como el “Barón Haussmann”, se construyeron bulevares, vastos parques y plazas, y monumentos impresionantes que transformaron el centro de París en una metrópolis moderna. Con todo, la “haussmannización” de la ciudad tuvo también una dimensión contrarrevolucionaria. En primer lugar, se hizo desaparecer del centro de París la mayoría de los barrios de chabolas, junto con las personas pobres y agitadas que habitaban en ellos y, por lo tanto, una ciudadanía potencialmente revolucionaria. Con ello se hizo sitio para construcciones hermosas pero caras, “immeubles de rapport”, “edificios que generan dinero”, como tiendas, restaurantes, oficinas y pisos bonitos. Estos proyectos proporcionaron jugosas oportunidades de ganar dinero a los burgueses ricos, pero, sobre todo, a los grandes bancos que aparecieron entonces en la escena económica, entre ellos el Crédit Lyonnais, la Société Générale y el Banco Rotschild, en el que trabajó desde 2008 hasta 2012 el actual Presidente de la República, Emmanuel Macron. Unas 350.000 personas pobres fueron expulsadas así del centro de la ciudad.

Las “gens de bien”, las “personas con propiedades”, se instalaron en la ciudad y las “gens de rien”», las “personas que no tienen nada”, se vieron obligadas a salir de su centro. Se les expulsó hacia el este, al Faubourg Saint-Antoine y a otros distritos periféricos de la ciudad, el “París de la pobreza” situado al este, que resultó ser un planeta muy distinto del “París del lujo” situado en el oeste. Fue desde esta parte este plebeya desde donde en 1798 el demos parisino había invadido el centro de París para “quitar la condición real” a la “ville royale”, “revolucionarla” y “democratizarla”. En 1871 la Comuna de París fue un último intento de lograr ese objetivo, pero el levantamiento fue reprimido por tropas que, procedentes de Versalles, entraron en París por los distritos occidentales de la ciudad, donde fueron recibidos con los brazos abiertos, pero se fueron encontrando con una resistencia cada vez más fuerte a medida que avanzaban hacia el este de la ciudad, donde acabaron los combates con la ejecución de muchos comuneros y comuneras que había sido capturados.

La sangrienta represión de la Comuna selló el triunfo de una burguesía francesa que a partir de entonces fue resueltamente, casi fanáticamente, contrarrevolucionaria. Había terminado la “Era de las Revoluciones”, tanto en Francia como en el hervidero revolucionario del país, París. Parecía haber desaparecido para siempre la posibilidad de que la plebe de la capital la conquistara y, a la inversa, el aburguesamiento de la ciudad que había emprendido Napoleon parecía entonces un hecho consumado.

Con ocasión del primer centenario de la Gran Revolución en 1889 se certificó simbólicamente este triunfo de la burguesía con la construcción de la Torre Eiffel, una especie de tótem sobredimensionado que evocaba la modernidad, la ciencia, la técnica y el progreso, unos valores con los que en general se identificaba la “tribu” burguesa de Francia y del extranjero, y en particular la recién nacida “Tercera República” francesa. El “pilar republicano” funcionó también como símbolo fálico de la joven, dinámica y potente clase que la burguesía victoriosa creía ser.

La obra de Eiffel, que se alzaba sobre de las aguas del Sena y evocaba un faro, parecía irradiar la brillante luz de la modernidad a todo el país y, de hecho, a todo el mundo. Desde un punto de vista burgués, la Torre tenía también la cualidad de eclipsar tanto el muy horizontal Pont Neuf, emblema del antiguo París real, como Notre Dame, rostro arquitectónico de la antigua “ville royale”. La Torre proclamaba así la superioridad de la nueva Francia republicana y capitalista de la burguesía frente a la antigua Francia monárquica y feudal dominada por la nobleza y la Iglesia.Por último, la Torre sustituyó al Pont Neuf como principal atracción turística de la capital francesa y desplazó de hecho el centro de gravedad de la ciudad desde la Île de la Cité, centro de la rueda parisina, a las zonas burguesas del oeste de la ciudad, el suntuoso dominio del “beau monde” burgués.

Imagen: La Torre Eiffel durante la Exposición Universal de París de 1889, 
cuadro de Georges Garen (Wikimedia).

El gran especialista rumano en mitos y religiones antiguas Mircea Eliade afirma que los pueblos arcaicos tendían a sentirse abrumados por el vasto, aparentemente caótico y en muchos sentidos misterioso y aterrador mundo en el que habitaban, un mundo (o universo) del que no eran sino una parte infinitesimal, insignificante e impotente. Necesitaban poner orden y familiaridad en este mundo, es decir, transformar su caos en un cosmos, un mundo que siguiera siendo misterioso, pero que fuera hasta cierto punto familiar, comprensible y menos temible. Esto se solía hacer encontrando y marcando un centro, es decir, un lugar que tuviera un fuerte significado tanto en el espacio como en el tiempo, un espacio sagrado: ese lugar se consideraba el centro de un espacio geográfico, la tierra, y al mismo tiempo el lugar de un punto culminante en el tiempo, el lugar donde los dioses habían creado a los seres humanos y/o el mundo.

Un árbol muy viejo y grande o una montaña real o imaginaria, como una pirámide, podían servir de ese lugar sagrado, o si no, se podía construir un pilar o una torre y proclamarlo el centro (u ombligo, eje) del mundo y/o el lugar de la creación. Se puede decir que el ejemplo más famoso de este “axis mundi” era el zigurat o pirámide escalonada de la ciudad de Babilonia, la famosa Torre de Babel, conocida localmente en la época como Etemenanki, “el templo de la creación del cielo y la tierra”. Estas construcciones funcionaban como conexiones simbólicas entre la tierra y el cielo, permitían a los seres humanos ascender al cielo o, al menos, acercarse a él; y, a la inversa, permitían a los dioses descender a la tierra para crear a los seres humanos. Por consiguiente, también se consideraban escaleras y contenían escalones, que representaban peldaños, como en el caso de las terrazas de Etemenanki, los “Jardines Colgantes” de Babilonia, que los griegos consideraban una de las Siete Maravillas del Mundo.

Con la ayuda de estas ideas de Mircea Eliade se puede interpretar la construcción de la Torre Eiffel, su ubicación y sus características principales. Las revoluciones francesas que desde 1789 y hasta 1871 conmocionaron Europa y el mundo entero, pero sobre todo a la propia Francia, provocaron la desaparición del antiguo cosmos de la Francia feudal y monárquica, dominada por el binomio de nobleza e Iglesia. Después de casi un sigo de caos revolucionario emergió un nuevo cosmos, un orden capitalista en vez de uno feudal, cuyo exoesqueleto era una república y que estaba dominado económica y socialmente por la (alta) burguesía. Otros países iban a seguir su ejemplo, pero Francia fue el primero en lograr un estatus burgués casi perfecto, fue el Estado burgués primigenio.

La capital francesa, donde habían tenido lugar la mayoría de los principales acontecimientos revolucionarios, fue el epicentro de un emergente cosmos capitalista y burgués internacional. Por consiguiente, era de lo más conveniente que la metrópoli burguesa erigiera un monumento para confirmar y celebrar su estatus sagrado respecto al espacio y al tiempo: primero, como epicentro del nuevo mundo burgués y capitalista, y segundo, como lugar en el que se había producido, gracias a la(s) revolución(es), el nada fácil nacimiento de este nuevo mundo. La Torre Eiffel, el edificio más alto del mundo, era ese monumento, una especie de pirámide escalonada cuya perpendicularidad, interrumpida por tres pisos, evocaba también una escalera, como lo habían hecho las terrazas o “Jardines Colgantes” de Babilonia. Y, efectivamente, la Torre Eiffel proclamaba que París era la Babilonia, la ciudad de ciudades, del nuevo cosmos burgués.

La burguesía también había llegado al poder en otras ciudades europeas a lo largo del siglo XIX o principios del XX, por medio de revoluciones o no, pero ninguna capital se había aburguesado tan tempranamente ni tan completamente como París. Rusia, Alemania y el Imperio Habsburg eran monarquías, vinculadas a Iglesias “establecidas”, cuyas capitales iban a seguir siendo ciudades no solo reales, sino imperiales, que se jactaban de sus palacios imperiales y aristocráticos, en su mayoría magníficos. y de sus iglesias exuberantes. En Gran Bretaña la clase media-alta liberal se convirtió en socia, aunque solo socia menor, de una nobleza terrateniente conservadora que siguió estando al mando desde el punto de vista político, social y también arquitectónico y urbanístico. Así, Londres siguió siendo un mundo urbano con dos polos arquitectónicos feudales, en un extremo la Torre, una fortaleza medieval parecida a la Bastilla, un fósil del absolutismo real, y en el otro el tándem del palacio de Buckingham, un palacio de las Tullerías británico, y la abadía de Westminster, la Notre Dame londinense. No es casual que el estilo de la mayoría de las grandes creaciones arquitectónicas de la época se conociera como “victoriano”, lo que reflejaba e incluso enfatizaba su relación con la monarquía.

En comparación con otras capitales, después de 1871 París parecía “über–bourgeois”, burguesa por encima de todo. No es de extrañar que la ciudad fuera admirada, visitada y elogiada por mujeres y hombres burgueses, jóvenes y viejos, conservadores y vanguardistas de todo el mundo, esto es, del mundo “occidental”, que cada vez era más industrial, capitalista y, por supuesto, burgués. Personas burguesas acomodadas de todo el mundo convergían en París como los peregrinos católicos convergían en Roma o los peregrinos musulmanes en La Meca. A la inversa, un París aburguesado, simbolizado sobre todo por el urbanismo y la arquitectura “haussmannianos”, emigró a ciudades de todo el mundo donde la burguesía también había triunfado política, social y económicamente. Por ejemplo, Bucarest, Bruselas y Buenos Aires hicieron todo lo posible por parecerse a la capital francesa, con imponentes residencias y costosos “edificios que generaban dinero” situados en amplias avenidas o vastas plazas, y con imponentes edificios gubernamentales, bancos, bolsas, teatros, hoteles palacio y restaurantes de lujo.

En 1871 bajó el telón de la dramática “Era de las Revoluciones” francesa, pero por debajo de la superficie, y a veces por encima, persistió el conflicto de clases de menor intensidad y con él la simbólica “Batalla por París” librada entre ricos y pobres. La burguesía creía haber ganado la batalla, pero su victoria nunca fue verdaderamente completa. El este de París siguió siendo plebeyo e igualmente plebeyos, incluso proletarios, fueron los nuevos barrios pèriféricos que proliferaron al este y al norte de la capital, como Saint-Denis. Es ahí donde se instalaron los inmigrantes llegados de toda Francia y del extranjero en busca de trabajo en la capital, pero que no podían pagar los elevados precios de la vivienda en el centro y los barrios del oeste de la ciudad.

A lo largo de los 135 años pasados desde la construcción de Torre Eiffel, París logró seguir siendo burguesa, pero no con tanta seguridad como se podría creer. De hecho, esta supremacía burguesa se vio amenazada varias veces. No obstante, la ocupación alemana de 1940-1944 no fue un problema a este respecto, como cabría pensar. La burguesía prosperó en Francia, y especialmente en París, bajo los auspicios del ocupante y del régimen colaboracionista de Vichy, ambos ávidos practicantes de políticas de bajos salarios y altos beneficios. Hitler, que era él mismo un “petit bourgeois” que había sido cooptado por la“haute bourgeoisie” alemana y gobernaba en su nombre, admiraba París. No tenía intención de destruir la ciudad, pero en colaboración con el arquitecto Albert Speer planeó transformar Berlín de modo que la capital alemana ocupara el lugar de París como una Babilonia burguesa. El Führer también opinaba que muchos franceses no estaban descontentos con la presencia alemana en la “Ciudad de la Luz”, porque eliminaba “la amenaza de los movimientos revolucionarios” (2).

Foto: Visita de Hitler a París el 23 de junio 23 de 1940 (Wikimedia).

Y, efectivamente, en agosto de 1944, cuando los alemanes se retiraban de la ciudad y las tropas aliadas procedentes de Normandía no habían llegado todavía, se produjo una situación potencialmente revolucionaria que amenazaba la supremacía burguesa en París. Surgió así una oportunidad de que la Resistencia de izquierdas, dirigida por los comunistas, llegara al poder en la capital y potencialmente en todo el país, y en ese caso muy probablemente se habrían producido reformas anticapitalistas extremadamente radicales. Pero los estadounidenses frustraron esa posibilidad. El ejército estadounidense trasladó rápidamente a París al general de Gaulle (al que antes había ignorado, algo que él nunca perdonaría a los estadounidenses) y lo presentaron como el indiscutible líder supremo de la Resistencia, aunque en realidad no lo era. Pronto se convirtió en jefe del gobierno de la Francia liberada. Su entrada triunfal en la capital no se escenificó en la plaza de la Bastilla ni en ningún otro lugar del este de París, sino en los Campos Elíseos, la calle principal de los mismos distritos occidentales donde en 1871 una bienvenida entusiasta esperaba a las tropas que acudían desde Versalles para ahogar en sangre a la Comuna. De Gaulle iba a garantizar que el orden socioeconómico burgués se mantuviera intacto en Francia y con un París, como la guinda del pastel, que iba a seguir siendo igualmente burgués.

Foto: Charles de Gaulle camina por los Champs Élysées el 26 de agosto de 1944 (Wikimedia)

El hecho de que el aburguesamiento de París nunca estuvo totalmente asegurado también se hizo evidente que en mayo de 1968, cuando obreros y estudiantes se declararon en huelga y se manifestaron en el Barrio Latino y otras partes del centro de la ciudad, y la situación amenazó con degenerar en una guerra civil o una revolución.

Por otra parte, también hubo intentos de perfeccionar el aburguesamiento de la Ciudad de la Luz. Así es como se pueden interpretar los grandes proyectos que se emprendieron en el este de la capital, primero por parte del sucesor del general de Gaulle, Georges Pompidou, que decidió que las últimas barriadas del centro de París dejaran sitio a un centro de arte que recibió su nombre. Poco después, bajo los auspicios del presidente François Mitterand, en teoría socialista pero en realidad un “bourgeois gentilhomme”, “burgués gentilhombre”, iniciativas como la construcción de una nueva ópera en la plaza de la Bastilla y un nuevo Ministerio de Finanzas, así como de un estadio deportivo en el barrio obrero de Bercy, pretendían oficialmente rejuvenecer el este de la ciudad a beneficio de sus habitantes plebeyos, pero los planes urbanísticos de Mitterand en realidad fueron una gentrificación a beneficio de la burguesía y especialmente de su “jeunesse dorée” o juventud dorada, para la que el oeste de París probablemente era demasiado burgués en el sentido de “aburrido”.

En 2018 surgió una nueva amenaza para el París burgués en forma de un movimiento cuyos numerosos y alborotadores participantes se conocieron como los “Chalecos Amarillos”. Estos manifestantes eran los “sospechosos habituales”, es decir, plebeyos de los barrios y suburbios del este de la capital a los que su unieron personas de toda Francia e incluso del extranjero en sus invasiones semanales de la ciudad. Se manifestaron muy provocativamente no solo en la Plaza de la Bastilla y en otros lugares de su “territorio” en el este de París, sino también en el corazón del “París del lujo” de la parte occidental, incluidos los Campos Elíseos. Los “Chalecos Amarillos” se la tenían jurada a la persona y al político del presidente Macron, un exbanquero que era tan presidente-burgués como Luis Felipe había sido un rey-burgués. El París burgués tembló mientras duró el movimiento, hasta que en 2020 la pandemia de COVID-19 proporcionó una justificación perfecta para prohibir las grandes concentraciones.

La reciente organización de los Juegos Olímpicos se puede ver, y entender, desde la misma perspectiva. En efecto, se han definido los Juegos Olímpicos modernos como un “capitalismo de celebración” (3), es decir, un fasto para la “clase capitalista” burguesa, cuya “crème de la crème” está formada actualmente por propietarios hiperricos, grandes accionistas y directivos de empresas multinacionales, magnates de los medios de comunicación, sus aliados financieros, juristas y celebridades multimillonarias como Lady Gaga, Céline Dion, etcétera. El objetivo fundamental de esta clase es maximizar los beneficios. Y la función de los Juegos Olímpicos es permitir esta acumulación de riquezas con la colaboración de la ciudad y el país anfitriones, que se supone facilitan esta privatización de los beneficios no exclusivamente, sino fundamentalmente, por medio de la socialización de los costes (4). Esta élite del capitalismo multinacional patrocina los Juegos Olímpicos y entre sus miembros hay sobre todo corporaciones originarias de Estados Unidos (actual centro de gravedad del sistema capitalista mundial), como Coca-Cola, pero también empresas francesas como Louis Vuitton (LV), que suministra todo tipo de productos de lujo, una empresa que floreció durante la ocupación alemana que, como hemos mencionado, no fueron malos tiempos para la élite burguesa francesa, típica consumidora de los muy caros artículos que LV pone a su disposición.

Esta élite internacional estaba deseando celebrar sus Juegos Olímpicos en París, pero en un París agradable, en un París en el que pudieran sentirse como en casa, y eso significaba la parte occidental y burguesa de la ciudad, el “París del lujo”. A su vez, para la burguesía, la “clase capitalista” de París y de toda Francia, los Juegos Olímpicos suponían una oportunidad de oro en dos sentidos. Primero, para obtener unos beneficios nunca vistos, por ejemplo, cobrando unos precios exorbitantes por las habitaciones de hoteles buenos del oeste de París, que incluso en épocas normales son caros, y también por los balcones de los pisos superiores de los edificios “que generan dinero” situados en lugares favorables, desde los que turistas adinerados podían aclamar a los atletas a su paso. En segundo lugar, y más importante al menos para lo que pretendemos, los Juegos Olímpicos también ofrecían a la burguesía la posibilidad de confirmar una vez más e incluso fomentar el aburguesamiento de la ciudad, y de permitir que París volviera a brillar, aunque fuera solo durante unas semanas, como la Babilonia de la burguesía internacional. En este contexto fue en el que se llevó a cabo la “limpieza social” (nettoyage social) de la ciudad, en concreto con la expulsión de las personas sin hogar y la concomitante “ocultación de la pobreza” (invisibilisation de la pauvreté) (5).

Así, también se puede entender por qué el día de la inauguración los barcos con miles de atletas a bordo salieron del puente de Austerlitz, situado en la cúspide del centro histórico de la ciudad y de sus barrios del este, el “París de la pobreza”. El espectáculo olímpico daba la espalda al París plebeyo al salir de ahí, de modo que se podía dejar sin ser vistos ni mencionados la plaza de la Bastilla, primordial “locus delicti” revolucionario, y, detrás de ella, el Faubourg Saint-Antoine, antaño la guarida del león revolucionario, en gran parte literalmente atrincherado; bastó con que anteriormente, concretamente el 14 de julio, día de la Toma de la Bastilla, la antorcha olímpica pasara brevemente por ese barrio. Así, la flotilla, impertérrita ante desagradables asociaciones con la Revolución francesa y las revoluciones en general, pudo descender alegremente por el Sena hasta el oeste de París, el París en el que una “celebración del capitalismo» deportiva era tan bienvenida como lo habían sido las tropas procedentes de Versalles y el General de Gaulle en 1871 y 1944, respectivamente.

Forzosamente también se tuvieron que utilizar para los Juegos Olímpicos algunas de las infraestructuras deportivas que resultaban estar en otros lugares, como el estadio nacional de fútbol y de rugby del barrio periférico plebeyo de Saint-Denis, un impresionante recinto conocido como Estadio de Francia. Con todo, la mayor cantidad posible de eventos, incluidos los más espectaculares, tuvieron lugar en los barrios del oeste. Las maratones acabaron en la vasta Explanada de los Inválidos y los ciclistas llegaron al fotogénico lugar que se podría considerar el punto topográfico central de los Juegos Olímpicos parisinos, prácticamente en la base de la Torre Eiffel, donde también se habían levantado instalaciones provisionales para pruebas como tenis y voley playa. Ahí fue también donde los atletas desembarcaron de los barcos para asistir a la ceremonia inaugural. En aquella ocasión, la columna de Eiffel, resplandeciente con miles de luces, proclamó a los parisinos, a los atletas y a todo el mundo no solo que la celebración olímpica del capitalismo era bienvenida en París, sino también que París seguía perteneciendo a la burguesía, al menos hasta que volviera a correr el peligro de una segunda venida de los “chalecos amarillos” o de la aparición de otra horda plebeya.

Notas:

(1) Véase Jacques R. Pauwels, “Napoleon Between War and Revolution”, Counterpunch, 7 de mayo de 2021.

(2) Véase los cometarios sobre París (incluida la Torre Eiffel) y Berlín in Adolf Hitler, Libres propos sur la guerre et la paix, París 1952, pp. 23, 81, 97.

(3) Véase Jules Boykoff, Celebration capitalism and the Olympic games, Londres 2014.

(4) Jules Boykoff, autor del concepto de “capitalismo de celebración”, considera los Juegos Olímpicos una forma inversa de economía de goteo, por la que la riqueza en realidad gotea hacia arriba, de los pobres a los ricos.

(5) Igor Martinache, “L’olympisme, stade suprême du capitalisme (de la fête)?”, Revue Française de Socio-Économie, 1:32, 2024, https://shs.cairn.info/revue-francaise-de-socio-economie-2024-1-page-5?lang=fr.

Jacques R. Pauwels es un prestigioso historiador y politólogo, e investigador asociado del Centre for Research on Globalization (CRG). Sus últimos libros publicados en castellano son Grandes negocios con Hitler, El Garaje Ediciones 2021, y Los grandes mitos de la historia moderna, Boltxe Liburuak 2021, que publicará a lo largo del mes de septiembre La Gran Guerra de clases, 1914-1918. Próximamente también se publicará en inglés How Paris Made the Revolution and the Revolution (re)made Paris, Iskra Books, US/UK/Ireland.

Esta traducción se puede reproducir libremente a condición de respetar su integridad y mencionar al autor, a la traductora y Rebelión como fuente de la traducción.